[Mise à jour avec réaction du Rassemblement national]
La Polynésie française a beau être située à près de 16.000 km de l’Hexagone et il y a beau avoir un décalage horaire de 12 heures entre les deux, une partie de la classe politique et du gouvernement a suivi avec attention le second tour des élections territoriales qui se déroulait ce dimanche soir (lundi matin, heure de Paris).
Et pour cause : avec 44,2% des voix, les indépendantistes du Tavini ont obtenu une majorité absolue de 38 des 57 sièges de l'Assemblée territoriale qui leur permettra de gouverner pendant cinq ans la collectivité du Pacifique sud. Cette victoire les place notamment en position de force face à l'État pour négocier un processus de décolonisation et un référendum d'autodétermination, à l’instar de leurs voisins calédoniens.
La liste autonomiste du président sortant Edouard Fritch, proche de la majorité d’Emmanuel Macron, n’a pour sa part récolté que 38,5% des suffrages.
L’un des premiers à avoir réagi est le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin. Avec son ministre délégué aux Outre-mer Jean-François Carenco, ils ont félicité Oscar Temaru, ancien président et tête de liste du Tavini, et Moetai Brotherson, candidat à la présidence, "pour leur victoire". "Les Polynésiens ont voté pour le changement", acte Gérald Darmanin dans un autre tweet.
"Un événement historique"
Un peu plus tard, ce lundi après-midi, c’est le fondateur de la France Insoumise (LFI) Jean-Luc Mélenchon qui a salué au micro d’Outre-mer la 1ère "un événement historique". "La Polynésie a su faire un choix qui met une limite qui dit : ‘Maintenant, stop ! On ne va pas se laisser faire’. Il y a une exigence avec la France que moi, j’approuve", affirme-t-il.
D’après son analyse d’homme de gauche, le choix des Polynésiens dans les urnes reflète un rejet de la politique néolibérale du gouvernement français. "Tous les Outre-mer français étaient déjà dans une situation de sous-équipement et de demande de mise à niveau, dénonce-t-il. Toutes ces années de politique brutale ont donné un résultat brutal, c’est que les gens ont l’impression que tout s’en va en petits morceaux et surtout ont l’impression qu’il n’y a pas de futur possible."
"Je pense que le vote de la Polynésie est une manière qu’a la population de dire : ‘Nous voulons avoir un futur, nous croyons en l’avenir, nous en avons besoin'", explique-t-il.
Jean-Luc Mélenchon espère que le futur président de Polynésie Moetai Brotherson, qui siège avec son partiLFI à l’Assemblée nationale, aidera à "instaurer une nouvelle relation" entre la France et l’archipel du Pacifique, même si cela ne s’annonce pas facile "car il y a beaucoup de contentieux".
"J’ai une totale confiance en lui pour savoir nous emmener les uns et les autres, pas seulement les Polynésiens mais nous aussi les Français du continent européen, la main dans la main", assure-t-il, en décrivant le député comme "extrêmement intransigeant dans le rapport avec le gouvernement français" tout en étant "un homme d’ouverture et de compromis".
"De nombreux combats communs"
La cheffe de file de LFI à l’Assemblée nationale Mathilde Panot a elle aussi félicité le parti indépendantiste et Moetai Brotherson sur Twitter en soulignant que les deux partis partageaient "de nombreux combats communs".
Le Parti socialiste, par la voix de son Premier secrétaire Olivier Faure, salue également la victoire du Tavini qu’il présente comme "une alternative de gauche" pour les Polynésiens.
En face, la réaction moins enthousiaste d’Hervé Marseille, sénateur centriste et collègue de la sénatrice polynésienne Lana Tetuanui. Il questionne l’impact de ce résultat "en Polynésie mais aussi pour la Calédonie et les Antilles".
Du côté du Rassemblement national, André Rougé, le député européen délégué à l'Outre-mer, conteste une réelle volonté d'indépendance des Polynésiens. "Il faut avant tout interpréter cela comme un vote de protestation contre la majorité territ et la majorité présidentielle d’Emmanuel Macron, affirme-t-il. La majorité territoriale du président Fritch est complètement affilié au président Macron et il n’est pas surprenant que les Polynésiens aient émis une protestation."
Le soutien des Corses
En quête d’une plus grande autonomie, plusieurs politiques corses ont salué la victoire des indépendantistes, en premier lieu le président du conseil exécutif de Corse Gilles Simeoni qui a tweeté : "Le message des urnes doit, en Polynésie comme en Corse, être respecté par Paris."
Au-delà de l’Hexagone, les réactions sont aussi venues des autres territoires d’Outre-mer. La députée réunionnaise Karine Lebon (Nupes) a félicité les Polynésiens "pour ce choix historique".