"Il faut rebâtir une agriculture nouvelle" : le président de la caisse de Sécurité sociale de Mayotte à Paris pour défendre les agriculteurs

La grande majorité des exploitations agricoles de Mayotte ont été détruites par le cyclone Chido.
Six semaines après le passage du cyclone Chido, le président de la caisse de Sécurité sociale de Mayotte, Nourdine Dahalani, est à Paris. À l'issue d'une réunion avec les mutuelles sociales agricoles, il estime avoir eu l'opportunité de porter la voix des Mahorais et d'exprimer leurs besoins.

Nourdine Dahalani, président de la caisse de Sécurité sociale de Mayotte était ce mercredi matin convié à une réunion annuelle au siège de la mutualité sociale agricole (MSA) à Bobigny, en Île-de-France. Une invitation historique pour porter au niveau national la voix des agriculteurs mahorais et demander une gestion locale des exploitants, six semaines après le passage dévastateur de Chido sur l'archipel. Il a répondu aux questions d'Outre-mer La 1ère. 

Outre-mer La 1ère : Vous avez été invité pour la première fois à cette réunion de la MSA. Quelle a été la teneur des discussions ? 

Nourdine Dhalani : C'est notre première invitation, car notre caisse ne gère pas les exploitants de Mayotte, c’est la caisse d’Armorique qui s'en occupe. C'était l'occasion pour nous de profiter de cette assemblée pour témoigner des enjeux auxquels Mayotte est confrontée suite au cyclone qui a tout dévasté. L’occasion aussi de souligner l’action de générosité portée pour octroyer une aide exceptionnelle aux exploitants de Mayotte.

En tant que président de la caisse de Sécurité sociale, c’est une opportunité de porter la voix des agriculteurs et d’exprimer la volonté de la caisse de participer à la construction d’une MSA à Mayotte, adaptée aux réalités du territoire. Nous estimons qu'à l’instar de ce qu’il se fait dans les autres départements d'Outre-mer, nous avons le droit de gérer les cotisations et les prestations sociales de nos exploitants.

Pour illustrer mon propos, nous avons une agriculture saisonnière en deux saisons, celle des pluies et la saison sèche, et non pas quatre saisons comme dans l’Hexagone. Ce ne sont donc pas les éleveurs de cochons de Bretagne qui sont les plus à même de comprendre les spécificités de Mayotte.

Avez-vous le sentiment d'avoir été entendu ? 

Les échanges que nous avons pu mener nous font penser que nous serons soutenus dans ces démarches par la caisse d’Armorique et la caisse centrale. Il s’agit d’une compétence du législateur. Le processus est lancé, nous pouvons compter sur elles pour le soutenir.

Les agriculteurs veulent pouvoir manger, vivre alors que nous ne pouvons rien produire pendant un an. Ils ont besoin qu’on leur garantisse que les prélèvements des cotisations vont être gelés. Qu’on leur garantisse un revenu minimum de survie durant cette période de faible production et qu’on les aide à remettre en route leur exploitation. Ils ont besoin de semences, de fourrage et d'équipements. Ce sont des appels à la générosité que nous avons lancés auprès des autres présidents de caisses.

Pour le moment, un gel des cotisations est acté jusqu’au 31 mars. Ce n’est pas suffisant. Dans le cadre de la révision du dispositif, nous demandons à ce qu’il soit étendu jusqu’à la prochaine saison des pluies en 2026. Quand les caisses seront saisies pour avis, j’ai bon espoir qu’elles pousseront cette demande.

Des tronçonneuses ont été offertes par les Jeunes Agriculteurs et distribués par l'association Saveurs et Senteurs

Beaucoup d’agriculteurs mahorais ont raconté avoir tout perdu, avez-vous fait un état des lieux des dégâts après le passage de Chido ?

Les données sont là, il n’y a plus rien ! Aucun bâtiment agricole n’est debout. Cette année, on ne produira rien. Le mois du ramadan approche, on va devoir tout importer. Avec le coût des aliments, vous imaginez ?

Il faut rebâtir une agriculture nouvelle, repartir de zéro. Si on ne les accompagne pas, les gens ne vont plus se maintenir dans le domaine, alors qu’on a besoin de développer l’agriculture, d’alimenter les enfants de Mayotte. Il est crucial qu’on trouve tous les leviers possibles pour maintenir l’activité, que ce soit la voie législative ou la solidarité.

La Salon de l'Agriculture a annoncé offrir un stand à une dizaine de producteurs mahorais. Est-ce un soulagement pour vous ? 

Je ne peux pas répondre à la place des exploitants. C’est un moment de rencontres et d’enrichissement qui peut leur permettre de nouer des relations. C'est aussi peut-être l’opportunité de solliciter une solidarité auprès d’autres opérateurs. Je ne pense pas que nous avons de la production à exposer. Mais pourquoi pas permettre aux professionnels de nouer ces contacts-là.

La caisse est très mobilisée pour la cause des agriculteurs, nous estimons que l’agriculture est vraiment la base de la prévention de la bonne santé d’une population. Si on ne peut pas se nourrir bien, c’est tout un tas de maladies qu’on devra soigner derrière. Nous mettons tout en place pour permettre le relèvement de l’agriculture dans de meilleures conditions.