En se présentant au pupitre lors de la conférence de presse hebdomadaire du groupe La France insoumise à l'Assemblée nationale, mardi 10 octobre, le Martiniquais Jean-Philippe Nilor, un des trois Ultramarins à siéger avec LFI, avait deux annonces à faire : d'abord, que les territoires d'Outre-mer seraient désormais appelés "territoires transocéaniques de France" par les Insoumis ; ensuite, qu'il défendra la proposition de créer une commission d'enquête sur la gestion des risques naturels dans les territoires ultramarins à l'occasion de la niche parlementaire de son groupe, le 30 novembre.
Prenant la parole après la présidente du groupe Mathilde Panot, Jean-Philippe Nilor a mis les pieds dans le plat : "Nous profitons de cette opportunité pour remettre fondamentalement en cause le terme 'Outre-mer', lâche-t-il. Moi, lorsque je suis en Martinique, je ne peux pas me dire Outre-mer. C'est Paris qui est Outre-mer. L'adoption de cette notion (...) traduit quelque part un gros problème : on nous impose de nous définir par rapport à un centre qui serait Paris, l'Hexagone."
Désormais, lui et ses collègues insoumis parlerons de "territoires transocéaniques de France", un terme "moins injurieux, moins méprisant de ce que nous sommes", dit-il. En début d'année, l'ancien ministre délégué aux Outre-mer Jean-François Carenco avait également proposé de réfléchir à un changement de dénomination, "Outre-mer" étant perçu par certains comme un héritage de la France coloniale. Lui avait suggéré "France Archipel".
Une commission d'enquête sur les risques naturels
Les précisions lexicales étant faites, Jean-Philippe Nilor, au nom des députés La France insoumise, a annoncé que le groupe allait présenter une proposition de résolution lors de sa niche parlementaire visant à créer une commission d'enquête sur la gestion par l'État des risques naturels majeurs dans les Outre-mer, "omniprésents dans [ces] territoires".
"Les manifestations du changement climatique impactent durablement et très grièvement notre planète. Les territoires transocéaniques de France, dans tous les océans, sont les premières victimes de ce changement climatique."
Jean-Philippe Nilor, député LFI de la Martinique
Séismes, incendies, inondations, éruptions volcaniques, glissements de terrain, ouragans, tsunamis... Les territoires ultramarins sont en première ligne sur le front climatique, présentant un risque pour la nature, les infrastructures, mais aussi pour les habitants. "Face à ça, de quels moyens disposons-nous aujourd'hui ? Il est important de se poser cette question", avance le Martiniquais pour justifier la proposition de résolution.
Le Sénat s'était déjà penché sur la question à la suite de l'ouragan Irma, qui avait frappé la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy en 2017. Dans un rapport remis en 2018, la délégation sénatoriale aux Outre-mer avait émis une soixantaine de recommandations visant à mieux gérer les risques majeurs. Une délégation interministérielle spécifiquement dédiée aux aléas naturels Outre-mer avait été créé en 2019, mais pour deux ans seulement.
"Les moyens ne semblent pas être à la hauteur"
"Aujourd'hui, on peut considérer qu'il y a une forme d'inaction de l'État qui pourrait s'apparenter à de la non-assistance à peuples en danger", a estimé Jean-Philippe Nilor, prenant pour exemple le Plan Séisme Antilles, jugé inefficace. Au mois de mars, la Direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Guadeloupe (Deal) avait souligné la difficulté pour les communes d'appliquer les mesures de ce plan conçu en 2007. "Les moyens ne semblent pas être à la hauteur", critique le député.
Si elle est votée par l'Assemblée nationale le 30 novembre, la commission d'enquête sur la gestion des risques naturels en Outre-mer sera la deuxième commission d'enquête concernant les territoires ultramarins lancée par les députés de l'alliance de gauche Nupes, après celle sur la vie chère de Johnny Hajjar, dont le rapport a été rendu au mois de juillet.
Reste que l'avenir de la commission d'enquête de Jean-Philippe Nilor dépendra de l'ordre du jour que décidera La France insoumise. Lors de sa niche du 30 novembre, le groupe devrait présenter onze textes, dont un sur l'inscription du droit à l'IVG dans la Constitution, un autre sur l'indexation des salaires sur l'inflation ou encore un sur l'abrogation du report de l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Si la proposition du Martiniquais est en fin de liste, le texte aura des chances de passer à la trappe. L'ordre d'examen sera dévoilé par les Insoumis le 6 novembre.