Cette martiniquaise a déclaré la guerre à la drépanocytose, cette maladie génétique qui touche 50 millions de personnes à travers le monde. Parmi elles, son fils Taylor. La présidente de l’APIPD, l’Association pour la prévention et l’information de la Drépanocytose rêvait de devenir chirurgienne cardiaque. Cela n’a pas pu se faire, à son grand désespoir. Mais avec son nom, le même que celui du père de la médicine, Jenny Hippocrate se bat depuis plus de 30 ans contre la maladie. Elle s'est confiée dans #MaParole (émission du 26 janvier 2021).
1 Enfance en Martinique
Dans le premier épisode de #MaParole, Jenny Hippocrate revient sur son enfance martiniquaise. Une enfance à la fois difficile et joyeuse. Douzième d’une fratrie de quatorze enfants, elle a grandi à la dure. "A midi c’était poisson et fruit à pain et le soir fruit à pain et poisson", s'amuse Jenny Hippocrate. Les tâches ménagères, la corvée d’eau, les raclées de sa mère et de ses frères, c'était son quotidien. Mais elle n’a aucune rancune, au contraire, beaucoup de reconnaissance envers les siens.
Sa mère, au départ vendeuse de poissons puis patronne d’un dancing, a réussi à faire bouillir la marmite. Elle se dit "fière" de sa famille et de ses frères et sœurs. Elle voue une affection particulière à son père mort dans ses bras alors qu’elle n’avait que 20 ans.
Jenny Hippocrate aimait l’école. "Meneuse mais très réservée", elle n’avait pas beaucoup d’amis de son âge. On la surnommait Ti Jenny, la petite Jenny en créole car elle était menue et pas très grande. A la maison, la famille était très catholique pratiquante. Pas un repas sans un bénédicité. "Quand on a la foi, on devient positif et ça aide à vivre", dit-elle.
2 Combat contre la drépanocytose
Arrivée dans l’Hexagone, Jenny Hippocrate a commencé des études pour devenir assistante sociale. Ce qu’elle ne souhaitait pas du tout faire. Elle a fini par suivre des études de psychologie. Elle a fait ses premiers pas dans ce domaine dans un centre pénitencier près de Bordeaux.
En 1992, sa vie a changé du jour au lendemain. Jenny Hippocrate venait d’accoucher de son troisième enfant, Taylor. L’accouchement ne s’est pas bien passé, l’enfant a dû être transfusé. De passage en Martinique, sa mère lui a dit : "ton enfant est très beau, mais il pleure trop". Quelque chose ne tournait pas rond. Taylor ne supportait pas très bien l’avion. Il avait les pieds et les mains gonflés. "C'était le premier symptôme de la maladie", explique aujourd'hui Jenny Hippocrate.
Quelques jours plus tard de retour à Saint-Ouen, chez elle près de Paris, au téléphone, une infirmière lui annonçait sans prendre de gants que son enfant était atteint de la forme la plus grave de la drépanocytose. C’est là qu'a commencé le combat de sa vie. Au lieu de flancher, Jenny Hippocrate s'est mis à remuer ciel et terre pour comprendre la maladie. Elle s'est rapproché de l’APIPD et elle en est devenu progressivement la présidente et la porte-parole.
La drépanocytose est la maladie génétique la plus répandue au monde. Elle touche 50 millions de personnes à travers la planète. Elle déclenche une déformation des globules rouges qui obstruent les vaisseaux sanguins et donc provoque des douleurs terribles. Les drépanocytaires sont des personnes très fragiles, moins résistantes aux infections.
Comment Taylor pouvait-il vivre avec la maladie ? A force de se renseigner, de lutter, Jenny Hippocrate a transmis sa foi en l’avenir à son fils. "Taylor a très vite compris que c’était mourir ou vivre", explique-t-elle. Toutes les six semaines, on lui changeait son sang.
3 Hippocrate n'est pas un pseudonyme
A la tête de l’APIPD, Jenny Hippocrate a lancé avec d’autres le Drépaction qui mobilise des artistes et permet de recueillir des dons. En 2009 a eu lieu la première édition au Zénith à Paris. Un souvenir inoubliable pour la militante. Cette année (voir tweet ci-dessous), le Drépaction a lieu à la Cigale le 24 septembre à Paris avec plein d'artistes tels que Jean-Claude Naimro ou M'Toro Chamou. Le 28 septembre, Jenny Hippocrate se verra remettre la médaille d'Officier de l'Ordre national du mérite au Conseil Régional d'Ile-de-France.
Toutefois, la Martiniquaise déplore toujours le manque de moyens alloués à cette maladie. "On a de supers médecins en France qui travaillent sur la drépanocytose, mais ils n’ont pas les moyens", s’indigne-t-elle. La raison ? Selon la présidente de l’APIPD, comme "c’est une maladie des noirs, des pays sous-développés", ça n’intéresse pas les laboratoires ni les gouvernements occidentaux. Et pourtant, avec le métissage grandissant de la population mondiale, Jenny Hippocrate craint une explosion des cas de drépanocytose dans les années à venir.
Jenny Hippocrate en 5 dates
♦ 26 septembre 1980
Décès du père de Jenny Hippocrate
♦ 23 juillet 1984
Oui à la demande en mariage de son mari, Alex Fixy
♦ 25 mars 1992
Naissance de Taylor.
♦ 6 septembre 1992
Premier voyage de Jenny en Afrique, au Sénégal pour comprendre la drépanocytose
♦ 24 septembre 2012
Mort de Nedzulie Newton Hippocrate (mère de Jenny)
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