À la force de ses bras, Joël Jeannot accélère le mouvement des roues de son fauteuil sur la dernière ligne droite du 10 000 m. Il boucle le 25e tour sur son engin de 8 kilos. À l’entrée du virage, le Martiniquais, en seconde position, fournit un ultime effort. Le para athlète antillais attaque. Il double le Thaïlandais Wahorum et prend la première place de la finale en 20 minutes 51 secondes 87, record paralympique pulvérisé. À 39 ans, il s’offre son premier titre en individuel. "C’est la meilleure émotion sportive" confie Joël.
Athènes 2004, le natif de Saint-Joseph est à la fois porte-drapeau et capitaine de l’équipe de France paralympique. Il est sélectionné dans cinq disciplines : 1 500 m, 5 000 m, 10 000 m, relais 4x400 m et marathon. Joël rêve de ramener une médaille d’or en individuel, et de préférence au marathon. C’est sur les 10 kilomètres que le tricolore brille.
Ses troisièmes Jeux Paralympiques n’ont pas débuté sous les meilleurs auspices. Le début de la journée présageait peu d’espoir pour la victoire. Le spécialiste du 1 500 m fauteuil passe à côté de sa course et termine neuvième sur dix. Pas question de se décourager pour le Martiniquais, motivé par les 4 valeurs paralympiques : détermination, égalité, inspiration et courage. Les affres de la vie, obstiné et persévérant, Joël les a tous surmontés.
L’évolution fulgurante de Joël Jeannot
En août 1990, en Martinique, à 25 ans, lors d’une journée de travail ordinaire, une benne tombe d’un camion et lui brise le dos. La moelle épinière du jeune mécanicien est sectionnée. Ses deux jambes sont paralysées.
L’enfant de Saint-Joseph quitte son île natale. Il entame sa rééducation et décide de s’installer à Astier, une commune de Dordogne. Passionné de sport, il ajoute des roues à son fauteuil et pratique tout d’abord le basket. Puis, il se lance sur les pistes d’athlétisme. Les performances sont immédiates. Il enchaîne très rapidement de nombreuses victoires. Sa notoriété dépasse les pistes de course du Périgord et de l’Aquitaine.
Quatre années après son accident, il connaît ses premières sélections en équipe de France et dispute les championnats de France et d'Europe. Il gagne au total 10 titres nationaux. Il participe à ses premiers Jeux à Atlanta. 6 jours sur 7, le bourreau de travail dévale les terrains en quête d’un meilleur chronomètre. Quatre ans plus tard, à Sydney, il décroche son premier titre au relais 4x400 m. À Athènes, il rapporte deux médailles, or en 10 000 m et argent au relais 4X400 m.
L’homme de tous les défis
À son retour de Grèce, le vainqueur du marathon de Paris 1999 et 2000 annonce sa retraite sportive. Mais quelques mois plus tard, submergé par l’adrénaline des exploits, il se lance dans le cyclisme handisport, le vélo à bras pour les personnes en fauteuil roulant. Il est médaillé de bronze en course en ligne aux Jeux Paralympiques de 2012 et 2016. Il domine totalement cette épreuve dans l’Hexagone. Il est sacré à 14 reprises champion de France et 4 fois champion du monde. Le Martiniquais s’est lancé un autre défi pour son après-carrière : la course automobile.
Après plus de 20 ans au plus haut niveau, Joël Jeannot transmet son expérience exceptionnelle à de jeunes para athlètes. Ils seront sur la ligne de départ de Paris 2024.