Les huitièmes de finale ? Facile. Les quarts ? Légèrement plus compliqués, mais c’est passé. Les demis, en revanche, furent un chemin de croix. La déception. Amandine Buchard, multiple médaillée du monde, d'Europe et olympique, faisait son entrée en lice sur les tatamis de l'Arena Champs-de-Mars dimanche 28 juillet pour la deuxième journée des épreuves de judo des Jeux Olympiques de Paris. La veille, ses camarades Shirine Boukli et Luka Mkheidze ont ramené les premières médailles à la sélection française. Mais celles-ci n'étaient "que" de bronze et d'argent.
Pour ces Jeux à la maison, la Martiniquaise n'avait qu'un seul objectif en tête : monter sur la première marche du podium pour rendre fière sa famille, venue la soutenir dans le Grand Palais éphémère transformé en enceinte sportive pour l'occasion, mais aussi son amie judoka, la Wallisienne Julia Tolofua, qui n'a pas été retenue par la fédération française de judo pour combattre dans sa catégorie aux JO. Mais surtout pour être fière d'elle-même. Et ne pas se contenter de l’argent, comme aux Jeux de Tokyo 2020. Peine perdue : en s’inclinant face à l'Ouzbèke Diyora Keldiyorova en demi-finale, elle a raté sa chance de décrocher l'or. Elle se contente donc d’une belle (mais frustrante) médaille de bronze après avoir vaincu la Hongroise Réka Pupp.
Sous pression
Soumise à la pression de la compétition, Amandine Buchard est sa pire ennemie dans ce genre de configuration. En début d’année, elle avait dû déclarer forfait du Grand Slam de Paris (pourtant un bon entraînement à quelques mois des JO) pour se préserver. Plusieurs fois, cette pression mentale l’a empêché de donner le meilleur d’elle-même, lui faisant rater de justesse la victoire.
Mais dimanche, à Paris, portée par un public dominé par les supporters français, la licenciée de l'Athletic Club De Boulogne-Billancourt a abordé la compétition des -52 kg avec une certaine sérénité. Il faut dire, que, deux combats seulement avant son entrée en lice, elle assistait à l'élimination surprise de sa meilleure ennemie sportive : la tenante du titre japonaise, Uta Abe, qui l’avait empêché de décrocher l’or à Tokyo, il y a trois ans. Parfait pour la Martiniquaise, qui voit alors un boulevard se présenter à elle jusqu'à la finale.
Pour son premier combat, la Chypriote Sofia Asvesta n'a pas eu le temps de dire "ouf" qu'Amandine Buchard l'a éliminée de la compétition par ippon. Les quarts de finale, quelques minutes plus tard, sont plus délicats pour la judoka française. La Brésilienne Larissa Pimenta ne se laisse pas démonter. Elle pousse la Française au "shido", les pénalités au judo. Sauf qu’au bout de trois shido, c’est l'élimination directe. Pendant ce quart de finale, Amandine Buchard en a deux. Et, pour rajouter à la pression, le temps imparti est écoulé : la qualification en demi-finale se jouera sur le golden score. "Amandine ! Amandine !", crie le public. "Bubuche" parvient à arracher la victoire en maintenant son adversaire clouée au sol. Elle gagne. Ouf ! En passant devant les médias, elle n’a pas le temps de s’arrêter : "Il faut que je me prépare, il y a du lourd qui arrive après", glisse-t-elle, des gouttes de sueur sur le front.
La chute
Le "lourd", comme elle dit, c'est Diyora Keldiyorova. Arrivée d’Ouzbékistan, la jeune femme de 26 ans est devenue tout à coup une sérieuse menace pour la Martiniquaise lorsque, plus tôt dans la journée, elle détrôna la Japonaise Uta Abe, multi-médaillée et championne olympique en titre, membre d’une dynastie de judokas redoutables (son frère, Hifumi, déjà champion en 2021 au Japon, a récupéré son titre, dimanche, à Paris).
Amandine Buchard vit un enfer lors de cette demi-finale. Son adversaire la domine clairement. Le temps est long. La Française, en souffrance, n'arrive pas à attaquer efficacement. Dans le temps réglementaire, Diyora Keldiyorova parvient à déstabiliser la vice-championne olympique et marque un point waza-ari. Suffisant pour l'emporter une minute plus tard, devant un public désillusionné. Les drapeaux bleu-blanc-rouge et les pancartes représentant la tête de leur championne n'auront pas suffi à la qualifier pour la finale.
Agacée et déçue, Amandine Buchard ne s'avoue pas vaincue : reste le dernier combat, celui pour une médaille de bronze. Face à elle, la Hongroise Réka Pupp. Énergique, la Martiniquaise mène la bataille face à une adversaire chevronnée. Le public est avec elle. La victoire se joue au golden score : au bout de plus de 7 minutes de jeu, la Française renverse son adversaire, marque un waza-ari et l'emporte !
Amandine Buchard reste médaillée olympique en individuel, même si son sourire cache une certaine frustration. Elle pourra encore briller lors des épreuves de judo par équipes mixtes, samedi prochain. L'argent à Tokyo. Le bronze à Paris... L'or sera pour la prochaine fois.