Le projet de climatisation à l’eau de mer de La Réunion : que veut Ségolène Royal ?

Le projet de SWAC à La Réunion, Huguette Bello à l'Assemblée nationale et Ségolène Royal à l'Elysée en mars 2016
Fin mars, la députée de La Réunion Huguette Bello interpellait  Ségolène Royal concernant les travaux de climatisation à l’eau de mer d’une soixantaine de bâtiments qui n’avaient toujours pas débuté. Ségolène Royal avait alors mis en demeure Engie d'agir. Depuis, plus rien…

Acte 1 : 2008 un projet initiée à La Réunion

Dès 2008, les communes de Saint-Denis et de Saint-Marie envisagent de climatiser l'aéroport de La Réunion grâce aux eaux froides des profondeurs de la mer. Cette technique qui permet de faire des économies d'énergie a fait ses preuves en Polynésie française et à Hawaï. Le 28 avril 2011, le quotidien Les Echos annonce que les deux communes  regroupées dans le Syndicat intercommunal d’exploitation d’eau océanique (SIDEO) attribuent à GDF-Suez (aujourd’hui Engie) une délégation de service public pour la réalisation et l’exploitation de ce réseau de climatisation. 

Acte 2  : Octobre 2014 une première mondiale

Au total une soixantaine de bâtiments publics et privés (aéroport, université, centres commerciaux) doivent être climatisés grâce à l’eau des profondeurs de la mer. C’est le système SWAC (Sea water air conditioning) déjà en fonctionnement dans deux hôtels de Polynésie. Le tout pour un coût de 150 millions d’euros à La Réunion, dont 90 millions pris en charge par l’Etat. Les travaux sont censés démarrer mi-2015 pour une mise en chantier mi-2017. La presse nationale salue unanimement une première mondiale.

Entre 300 et 400 emplois seront créés sur le chantier, pour creuser les 23 km de tranchées pour enfouir les canalisations.  Il faudra également un tuyau de 6 km de long pour transporter l’eau de mer jusqu’à la côte. "Ce qui va être une première mondiale, souligne Eric Bassac reponsable du projet chez Engie dans la revue Pétrole et Gazc’est la conception, la réalisation et la mise en service d’un système free cooling offshore (utilisation directe des frigories de l’océan) à l’échelle d’une agglomération urbaine".

Acte 3 : Juin 2015 la révolution énergétique

En juin dernier, la mairie de Saint-Denis poste une vidéo (voir ci-dessous) sur ce projet innovant. Les chiffres font rêver. L’île qui importe la majeure partie de son énergie espère atteindre son autonomie énergétique en 2030. Ce projet de climatisation par l’eau de mer permettra d’économiser 75% d’énergie fossile, et de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 600 000 tonnes en 24 ans, soit l’équivalent des rejets en CO2 de 16 000 voitures par an. Regardez cette vidéo :


Acte 4 : 23 mars 2016 Huguette Bello à l’Assemblée nationale

Les travaux qui devaient démarrer mi-2015 n’ont pas commencé. Huguette Bello, députée de La Réunion interpelle le gouvernement et la présidente de la COP21 Ségolène Royal sur ce projet de climatisation à l’eau de mer, un "projet ambitieux et sans équivalent dans le monde", dit-elle. "Les études sont réalisées, les financements publics sont acquis, mais le démarrage des travaux vient d’être reporté à la demande de la filiale d’Engie (NDLR Climabyss)". La filiale d’Engie évoque plusieurs raisons pour justifier ce report, poursuit la députée, dont "la chute du prix du baril de pétrole qui remettrait en cause la rentabilité de ce projet".

La ministre de l’Ecologie répond sans langue de bois qu’elle partage l’étonnement de la députée de La Réunion. Elle affirme avoir écrit à Engie pour lui demander des explications sur son retrait. "A l’heure où je vous parle, je n’ai pas d’explication claire. J’ai donc l’intention de mettre cette entreprise devant ses responsabilités et si ce n’est pas le cas, nous donnerons ce marché à une autre entreprise qui aura la capacité de réaliser ce projet", lance la ministre. 


Huguette Bello interpelle Ségolène Royal sur... par la1ere

Acte 5 : 7 avril 2016 que veut Ségolène Royal ?

La1ere.fr a contacté dès le 23 mars le cabinet de la ministre, aucune réponse. Nous avons également contacté le service presse d’Engie qui ne souhaite faire "aucun commentaire à ce sujet". Le chargé de communication de l'ex-GDF-Suez nous l’a répété à cinq reprises au téléphone. Nous avons aussi écrit à l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), partie prenante du projet dont voici la réponse : "Au vu du sujet qui concerne directement Ségolène Royal et le ministère, et non l'ADEME, nous vous invitons à contacter le service presse du ministère afin d'avoir réponse à vos questions. Désolée pour notre réponse un peu tardive"

Hier, à nouveau, La1ere.fr a téléphoné au cabinet de Ségolène Royal et nous attendons toujours une réponse. Le sujet semble embarrasser tout le monde, sauf la députée Huguette Bello qui attend toujours la révolution énergétique promise à La Réunion pour 2030.