"Aujourd'hui, un an après [Wuambushu], nous lançons l'acte 2 du retour de l'ordre à Mayotte avec l'opération Mayotte Place nette." Avec une journée de retard sur le calendrier initial, la ministre déléguée chargée des Outre-mer Marie Guévenoux a finalement donné le coup d'envoi officiel à la nouvelle "opération de grande envergure" dans l'archipel de l'océan Indien, mardi 16 avril, sur France 2 puis lors d'une conférence de presse.
La ministre, qui a repris le dossier jusqu'ici géré par le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin, a fait cette annonce alors que les premières interventions des forces de l'ordre avaient déjà commencé dès le petit matin, à Mayotte. 400 gendarmes et policiers ont entamé les contrôles et arrestations dans les communes de Doujani et de Dembéni, a-t-elle précisé.
Une opération Wuambushu 2
Cette nouvelle mission sécuritaire dans le département le plus pauvre de France, qui doit durer jusqu'à la fin du mois de juin, est une prolongation de l'opération Wuambushu, lancée en avril dernier. Celle-ci avait permis la destruction de 700 bidonvilles, l'arrestation de 1.000 individus et l'expulsion de 25.000 personnes en situation irrégulière. Un bilan en demi-teinte, qui n'a pas permis de sortir l'archipel de la crise.
Ce qui change pour l'opération désormais intitulée "Mayotte Place nette", ce sont "des moyens et des objectifs renforcés", dit la ministre. Si Wuambushu avait tout misé sur une présence massive de forces de l'ordre sur les deux îles de Mayotte, avec l'envoi de plus de 500 policiers et gendarmes en renfort, ce sera moins le cas cette année. "On a des spécialistes de police judiciaire qui sont à même de travailler sur les cibles, celles qui nous intéressent en priorité. Et puis on a des spécialistes sur des sujets intéressants pour travailler sur le cyber, le financier, puisqu'on a aussi ces sujets qui se posent", a précisé le directeur général de la gendarmerie nationale Christian Rodriguez, présent à la conférence de presse de Marie Guévenoux.
On a mis tant sur le plan quantitatif que qualitatif des gens déjà depuis quelques mois, ce qui nous permet aujourd'hui d'avoir une opération qui a été construite en amont. C'est le bon moment pour le faire, ce qui permettra, notamment sur le plan judiciaire, d'avoir des bons résultats.
Christian Rodriguez, directeur général de la gendarmerie nationale
Un rideau de fer en mer
Les objectifs de l'opération Mayotte Place nette restent les mêmes que ceux de Wuambushu : les autorités ont identifié 60 chefs de gang à interpeller et veulent détruire 1.300 bidonvilles. Une enveloppe de 5 millions d'euros a par ailleurs été débloquée pour reloger les familles expulsées.
La ministre Marie Guévenoux en a profité pour apporter des précisions sur le "rideau de fer maritime" qu'elle avait annoncé aux côtés de Gérald Darmanin lors de son premier voyage à Mayotte, en début d'année. Ce dispositif doit empêcher l'arrivée de migrants venus des Comores et de l'Afrique des Grands Lacs.
Six opérations terrestres militaires seront menées avec la mobilisation des militaires et une section de trente hommes. Deux vedettes côtières de la gendarmerie maritime assureront une permanence en mer. Un bâtiment de la marine sera mobilisé dans le canal du Mozambique en haute mer pour bloquer la route des Grands Lacs. Le retour à l'ordre passe aussi par les airs. Un avion civil multipliera les heures de vol au-dessus de l'île et au large de nos côtes.
Marie Guévenoux, ministre chargée des Outre-mer
"Nul ne peut rester indifférent face aux difficultés que vivent chaque jour nos concitoyens Mahorais", a souligné la ministre déléguée, qui devrait retourner dans ce "territoire prioritaire pour l'État" au début du mois de mai.
Sur place, elle planchera avec les élus locaux sur l'avancée des deux projets de loi concernant le territoire, censés être présentés en conseil des ministres le 22 mai : la réforme constitutionnelle visant à abroger le droit du sol à Mayotte, et la loi d'urgence, qui comprendra des mesures sécuritaires, sur l'immigration et pour le développement économique et social du département d'Outre-mer. Quelques pistes explorées par la ministre : le retrait du titre de séjour aux parents de délinquants, ou encore la mise en place d'un titre de séjour au mérite pour les jeunes.