Mathieu Bastareaud : "J’ai toujours voulu tout faire au rugby et mon corps s’est rappelé à moi" [#MaParole]

Joueur international de rugby, Mathieu Bastareaud a eu une carrière intense et mouvementée. Aujourd’hui, il évolue au LOU (Lyon olympique universitaire) et vient de se blesser gravement à la main. Retour sur le parcours d’un guerrier dans #MaParole.

Après la région parisienne, Créteil, Massy, le stade français à Paris, le RCT (Rugby club de Toulon), New-York, Mathieu Bastareaud a choisi de poser ses valises à Lyon. Il a été victime fin décembre 2020 d’une blessure "importante et peu commune" selon l’Equipe. Une rupture du tendon quadricipital et une déchirure de l’aileron rotulien interne. Mais le rugbyman s’est remis et a rechaussé les crampons.

Malheureusement, le répit a été de courte durée. Le rugbyman s'est à nouveau blessé. Victime d'une fracture du quatrième métacarpe de la main droite, Mathieu Bastareaud, qui aura bientôt trente-trois ans, va devoir passer sur le billard. Un coup dur pour le rugbyman qui après une carrière en forme de montagnes russes semble avoir trouvé la sérénité. Il nous raconte son parcours mouvementé dans #MaParole.

#1 Le refus de la défaite

Natif de Créteil, Mathieu Bastareaud a grandi en région parisienne. Il avait trois ans quand ses parents ont décidé de divorcer. Son père un peu "taiseux" est resté à Créteil, sa mère s’est installée à Quincy-sous-Sénart dans l’Essonne. Très tôt, à l’âge de 5 ans, grâce au centre aéré qui proposait d’exercer diverses activités sportives, Mathieu Bastareaud a pris goût au rugby. Sa mère lui a trouvé un club et un mentor : Patrick Boullet, l’entraîneur du club de Créteil-Choisy le Roi. Pendant dix ans, Mathieu Bastareaud a suivi assidûment les entraînements. Quand il perdait, cela déclenchait chez lui des crises de larmes qui le laissaient inconsolable. Les prémices d’une hypersensibilité. Mais surtout le refus de la défaite.

Pendant les grandes vacances, Mathieu Bastareaud partait parfois en Guadeloupe, à Sainte-Anne, le berceau de ses parents. C’est là qu’il a vu la finale légendaire qui a opposé les All Blacks (Nouvelle-Zélande) aux Springboks (Afrique du Sud). Contre toute attente, l’équipe du pays de Nelson Mandela a gagné la Coupe du monde en 1995. Une histoire racontée avec force dans le film Invictus de Clint Eastwood. Mathieu Bastareaud se souvient qu’il n’avait d’yeux que pour le Néo-zélandais Jonah Lomu contre lequel les Springbocks avaient déployé toutes leurs forces.

En Guadeloupe, le jeune sportif suivait sans arrêt son "tonton Teddy" car lui aussi aimait le sport. A Sainte-Anne, Mathieu Bastareaud a croisé parfois son cousin William Gallas, un footballeur talentueux qu’il a souvent consulté par la suite. Il a d’autres cousins plus éloignés, les basketteurs Florent et Mickael Pietrus dont la famille est originaire comme lui de Sainte-Anne. A 15 ans, repéré pour son talent, le rugbyman guadeloupéen a été recruté par Massy. Deux autres clubs l’avaient approché : le Stade français et le PUC. A Massy, le joueur a peaufiné sa technique. Et avec son équipe, ils ont donné du fil à retordre à des clubs jugés pourtant plus forts.

 

#2 Le phénix

Après Massy, Mathieu Bastareaud a choisi d’intégrer le Stade français. Le club était alors dirigé par Max Guazzini, ami de Dalida et charismatique patron d’NRJ. Le jeune Bastareaud s’est très bien entendu avec Max Guazzini qu’il "respecte énormément". Il a porté le maillot rose du Stade français et s’est prêté de bonne grâce aux séances de photos pour deux éditions du calendrier Les dieux du stade. Une idée de Max Guazzini bien sûr. Tout semblait fonctionner à merveille. Sauf que le jeune rugbyman dormait assez mal, se faisait vomir avant de jouer, avait des crises de boulimie. Bref il était angoissé. Et puis il avait aussi envie de faire la fête comme ses amis d’enfance.

En 2009, après avoir été repéré par Bernard Laporte, entraîneur de l’équipe de France qui le voulait parmi les Bleus, Mathieu Bastareaud a participé à une tournée en Nouvelle-Zélande. Ce fut le début de la catastrophe. Après une défaite face aux All Blacks puis une réception, Mathieu Bastareaud est parti en ville boire des verres avec les copains. A son retour vers 4 heures du matin à l’hôtel, il s’est écroulé sur sa table de nuit, se blessant au visage. Au lieu de dire la vérité, le jeune rugbyman a choisi de mentir et de déclarer au staff qu’il avait été victime d’une agression de la part de cinq Néo-Zélandais. Un bourbier.

Cette "affaire Bastareaud" comme on l’a appelé à l’époque en 2009, a fait beaucoup de bruit car cinq jours après son retour en France, les images de vidéosurveillance ont montré clairement qu’il n’avait été  victime d’aucune agression. Et Là, François Fillon, alors Premier ministre, a écrit à son homologue néo-zélandais le message suivant: "Par ses déclarations mensongères, Mathieu Bastareaud a gravement porté atteinte à l’image de votre pays et de ses habitants". Gravement atteint psychologiquement par cette affaire, le rugbyman a failli mettre fin à ses jours.

Il y a un moment où l’on est tombé dans l’acharnement. Quand on s’en prend à votre famille. C’était franchement dur.

Mathieu Bastareaud

Max Guazzini a organisé une conférence de presse pour mettre un terme à ce scandale qui passionnait la presse. Si la page a été vite tournée, le rugbyman guadeloupéen a dû continuer à vivre avec cette histoire qu’il a longtemps portée comme un boulet. Mais tel un phénix, Mathieu Bastareaud a su renaître de ses cendres. Sanctionné par des travaux d’intérêt général, il a ensuite été à nouveau sélectionné en équipe de France en 2010 pour le Tournoi des 6 nations. La France a gagné. C’était pour Mathieu Bastareaud la plus belle des revanches. "On m’avait bien enterré. (...) Marc Liévremont (le sélectionneur des Bleus) m’a aidé à ce moment-là".

 

#3 Pilou-pilou pendant huit ans

Après le Stade français, le RCT (Rugby club toulonnais) a ouvert ses portes au Guadeloupéen. Il a découvert le pilou-pilou, l’hymne du RCT, le haka des Toulonnais. Il a aussi très vite compris quel était son nouveau statut de joueur. Impossible de passer inaperçu à Toulon. Le RCT est une institution. Quand il y des matchs à Mayol, toute la ville est en fête dès le matin.

Pendant 8 ans, Mathieu Bastareaud a endossé le maillot rouge et noir avec plus de hauts que de bas. Aux côtés de Jonny Wilkinson, le mythique joueur britannique, il a remporté le championnat de France et le fameux bouclier de Brennus en 2014. A son actif également : trois coupes d’Europe avec le RCT. Chez les Bleus, les sélections se sont enchaînées à un rythme irrégulier. Tout dépendait de l’entraîneur et des résultats.

Après ces années inoubliables passées au RCT, Mathieu Bastareaud a choisi de voir un peu de pays. Il aurait aimé partir au Japon, pays dont il adore la culture, en particulier les mangas et les animés. Il a choisi d’aller à New-York, mais l’épidémie de Covid-19 lui a coupé les ailes. Retour en France à Lyon cette fois. L’international est en train de vivre une fin de carrière à la fois passionnante et harmonieuse au LOU (Lyon olympique universitaire), même si une mauvaise blessure l’a immobilisé pendant huit mois et qu'une nouvelle blessure à la main lui empoisonne un peu la vie.

Mathieu Bastareaud lors du dernier France-Angleterre au Stade de France

A la prise de son : Bruno Dessommes.

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♦♦ Mathieu Bastareaud en 5 dates ♦♦♦

17 septembre 1988

Naissance à Créteil

►21 Juin 2009

Les événements de Wellington

31 mai 2014

RCT champion de France

18 novembre 2014

Oscar d’or Midi olympique

19 juin 2019

Met fin à sa carrière internationale