Référendum sur l'indépendance: quelles positions politiques hors de la Calédonie ?

Marine Le Pen, Jean Castex, Carles Puigdemont, Oscar Temaru et Christian Jacob.
"Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ?" : c'est la question posée dimanche, pour la deuxième fois, aux électeurs autorisés à voter pour ce scrutin. Depuis l'Hexagone, la Polynésie ou l'Espagne, plusieurs leaders affichent leur choix.
C'est le deuxième référendum d'autodétermination pour la Nouvelle-Calédonie, française depuis 1853. Le 4 novembre 2018, un première consultations avait vu les partisans du "non" et d'une Nouvelle-Calédonie française l'emporter par 56,7% des voix. Un écart avec le "oui" plus faible qu'attendu et qui incite de nouveaux des représentants des grands partis nationaux à faire part de leur position depuis Paris.
 

Ils appellent à voter "non"

►Stanislas Guérini (LREM)

Parce que je crois que la Nouvelle-Calédonie est une terre d'avenir, et que, pour réussir, elle a besoin de la France, dimanche, j'appelle à voter "non"


Dans un communiqué du 1er octobre, le délégué général de La République En Marche, Stanisla Guérini, appelle les Calédoniens à voter "non". "Si elle le veut, la Nouvelle-Calédonie a le droit de devenir indépendante", mais "l'indépendance n'est toutefois pas la seule option. Comme le reconnaissent les Nations Unies, un processus de décolonisation complet et légitime peut se traduire par le choix de rester dans la République".

Le chef de file du parti fondé par Emmanuel Macron appelle aussi "les Calédoniens à créer les conditions d'un nouveau dialogue", pour "construire un référendum différent", s'il devait y avoir une troisième consultation. 


Marine Le Pen (RN)

Ne pas céder à l'idée d'une indépendance déraisonnable


Dans une vidéo diffusée sur internet jeudi 24 septembre, la cheffe de file du Rassemblement National a appelé les habitants du Caillou à "ne pas céder à l'idée d'une indépendance déraisonnable".

"Que le 'non' l'emporte de nouveau et vous conforterez une fois de plus, et comme vous l'avez fait dans tous les scrutins depuis 1958, l'appartenance de la Nouvelle-Calédonie dans la France. Que le 'oui' l'emporte, et votre territoire quittera à brève échéance notre patrie pour accéder à une indépendance pleine d'incertitudes et lourdes de dangers et de déchirements", a déclaré Marine Le Pen.

"Je vous conjure de ne pas céder à l'idée d'une indépendance déraisonnable", a-t-elle poursuivi. "Qui peut sérieusement croire qu'un État de 300.000 habitants pourrait résister bien longtemps à l'appétit de ses très puissants voisins, qui ne manqueront pas, une fois la France partie, d'user de tous leurs moyens pour mettre la main sur vos richesses géologiques et maritimes"..


► Christian Jacob (LR) 

Vous êtes une part entière du Peuple français à laquelle nous tenons.


Le même jour, c'est dans une lettre adressée aux Calédoniens que Christian Jacob, président des Républicains, appelle les électeurs à voter "non". "Séparer le destin de la Calédonie de celui de la France serait un échec pour l’ensemble du peuple français, un retour en arrière, destructeur du rêve qui a bâti les trente dernières années", juge-t-il, assurant "l’attachement profond" que porte sa "famille politique" aux habitants du Caillou.

"Nous savons ici qu’aux antipodes de la métropole, dans le Pacifique, la petite patrie calédonienne vibre aux couleurs de notre grande patrie commune, la France. Vous êtes une part entière du Peuple français à laquelle nous tenons."


► Jean-Christophe Lagarde (UDI)

C'est une part du cœur de notre nation qui bat dans le Pacifique


Mardi 29 septembre, Jean-Christophe Lagarde, le président de l'UDI et Hervé Marseille Président du Groupe Union centriste au Sénat, ont également appelé les Calédoniens à voter non au référendum, dans une lettre patagée par Calédonie Ensemble. Trois des quatre parlementaires calédoniens (les députés Philippe Gomès et Philippe Dunoyer et le sénateur Gérard Poadja) font partie du groupe UDI.

"Nous souhaitons que le 4 octobre prochain, vous réaffirmiez le destin commun de la France et de la Nouvelle-Calédonie. Parce qu'à travers vous, c'est une part du cœur de notre nation qui bat dans le Pacifique", écrivent-ils dans une "lettre aux Calédoniens".

Ils appellent également au "dialogue et à la recherche de consensus" entre indépendantistes et non-indépendantistes, dès le 5 octobre, pour que "le destin commun" puisse "continuer à s'écrire, comme vous avez réussi à le faire lors des Accords de Matignon et de Nouméa", et souhaitent que l'Etat prenne "toute sa part" dans ce dialogue.
 

Ils ne se prononcent pas

► Emmanuel Macron - La neutralité du chef de l'État
Le président de la République a évoqué la question du référendum lors du Conseil des ministres du lundi 28 septembre. À la sortie, le porte-parole du gouvernement a affirmé qu'Emanuel Macron s'exprimerait "à la suite de ce référendum et quel que soit le résultat, évidemment, la mobilisation du gouvernement sera totale pour construire l'avenir de ce territoire"

Déjà en 2018, le chef de l'État avait attendu l'annnce des résultats pour s'exprimer : "Je veux dire la fierté pour le chef de l'Etat que la majorité des Calédoniens ait choisi la France, avait-il déclaré dans une alocution le 4 novembre 2018. En ce jour, le seul vaincu est la tentation du mépris, de la division, de la violence, de la peur. Le seul vainqueur c'esr le processus en faveur de la paix qui porte la Nouvelle-Calédonie depuis 30 ans, l'esprit de dialogue que plus rien n'entamera".

Malgré cette neutralité affichée, Gabriel Attal affirmait, lundi, que le scrutin du 4 octobre "aura vocation a être suivi d'un troisième référendum." Une formulation que n'a pas appréciée le député centriste de Nouvelle-Calédonie Philippe Gomès. Dans une lettre, il rappelle au porte-parole du gouvernement que "le deuxième, comme le troisième, sont des référendums facultatifs qui ne sont initiés que si 1/3 des membres du Congrès de la Nouvelle-Calédonie le demande. Pas de demande, pas de référendum... Donc le terme 'vocation' est inapproprié."


► Jean Castex, Premier ministre

L'État reste et restera impartial.


Interpellé à l'Assemblée nationale sur l'absence de communication du gouvernement sur le référendum, le Premier ministre a rappelé l'accord de 1998 qui dispose que "l'État reste et restera impartial".
Le Premier ministre Jean Castex devant l'Assemblée nationale.

Mais, a-t-il ajouté, "impartial ne veut pas dire en retrait", disant souhaiter "que la participation soit la plus élevée possible", notamment avec le prolongation de l'ouverture d'un bureau de vote délocalisé ou du traitement des "difficultés liées aux procurations réalisées depuis l'Hexagone et depuis l'étranger".


► Jean-Luc Mélenchon (LFI)
Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France Insoumise, n'a pas commenté la question du référendum en Nouvelle-Calédonie. En 2018, le député des Bouches-du-Rhône avait refusé de se prononcer en faveur ou non de l'indépendance. "Je m'en remets à la décision des Calédoniens", avait-il affirmé sur le plateau de l'émission de France 3 Dimanche en Politique, avant de nuancer : "si je faisais parler mon coeur, je dirais 'restons ensemble'"
 

Ils appellent à voter "oui"

Carles Puigdemont

Oui à l'indépendance de la Kanaky.


Dans une vidéo relayée sur Twitter le 26 septembre, Carles Puigdemont, leader indépendantiste de la Catalogne, appelle en français ses "chers amis de Kanaky" à voter "oui" à l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie. "Je vous soutiens, il y a beaucoup de Catalans qui sont à vos côtés", lance Carles Puigdemont aux habitants de "la Kanaky qui a le droit de devenir un état libre, un état indépendant et d'appartenir à la famille des nations libres du monde. Vous aurez toujours le soutien du peuple catalan et mon soutien en particulier".
Il conclut : "je suis convaincu que, cette fois, il y aura une grande majorité de vos concitoyens qui vont voter pour le 'oui' à l'indépendance de la Kanaky." Carles Puidgdemont avait déjà soutenu les indépendantistes lors du premier référendu en 2018. 
Le Calédonien Daniel Goa en compagnie du Catalan Carles Puigdemont et du parlementaire écossais Kenneth Gibson, en 2018.


Oscar Temaru, ancien président de la Polynésie

Le 4 octobre, nous gagnerons tous. La victoire de la Calédonie, ce sera aussi la victoire de la Polynésie.


"Je regrette sincèrement de ne pas être des vôtres pour cette campagne du référendum du 4 octobre", lance Oscar Temaru pour débuter un message vidéo daté du 18 septembre, évoquant les restrictions liées au coronavirus. En 2018, le leader indépendantiste polynésien s'était rendu sur le Caillou. L'ancien président de la Polynésie réaffirme sa "solidarité" et son "soutien" aux indépendantistes "pour ce référendum, en pensant aux martyrs, à tous ceux qui sont morts pour ce combat, pour cette lutte", évoquant notamment Jean-Marie Tjibaou, leader kanak assassiné un an après la prise d'otages sanglante de la grotte d'Ouvéa. 
Oscar Temaru

"Si le 4 octobre, les résultats sont positifs, la Nouvelle-Calédonie, ce nouvel Etat, continuera à négocier des accords de coopération avec la France, partenaire historique. La France, qui devra assumer ses responsabilités, ses obligations morales après l'accession de cet Etat à la plein souveraineté", prédit Oscar Temaru. "Si on veut que la Nouvelle-Calédonie demain soit un pays prospère, un pays où il fait bon vivre ensemble, avec toutes les communautés (...), c'est ensemble que nous devons construire l'avenir de ce magnifique pays qu'est la Nouvelle-Calédonie."


► Moetai Brotherson, député polynésien

Ça fait très longtemps qu'on partage cette lutte pour la liberté, pour l'auto-détermination.


Dans une vidéo publiée le 25 septembre, le député de Polynésie rappelle son soutien aux indépendantistes de "Kanaky""Nous, en Polynésie, on est spectateurs, on vous observe de loin, ajoute l'élu rattaché au Tavini Huiraatira No Te Ao Maohi. Nos luttes pour les indépendantistes sont parallèles depuis la nuit des temps." "Ça fait très longtemps qu'on partage cette lutte pour la liberté, pour l'auto-détermination."

Moetai Brotherson évoque d'ores et déjà l'après, "au lendemain de ce deuxième référendum (...) si le 'oui' l'emporte, les loyalistes resteront loyalistes pendant un certain temps, si le 'non' l'emporte, les indépendantistes seront toujours là. La revendication indépendantiste sera toujours là. Il faut apprendre à vivre ensemble, vous le savez mieux que moi." "Il ne s'agit pas d'exclure qui que ce soit, il s'agit de construire ensemble." L'indépendantiste polynésien conclut : "Évidemment, je souhaite que le 'oui' l'emporte et, si possible, très largement."

En 2018, il avait participé à la campagne de terrain pour le "oui" avec les leaders indépendantistes du FLNKS. La situation sanitaire, dit-il, ne lui a pas permis de renouveler l'expérience en 2020.