Septaine Outre-mer : « le trafic aérien loisirs devient ingérable », selon le directeur de la Chaire Pégase, Paul Chiambaretto

Jusqu’ici les compagnies aériennes françaises ont profité de l’attractivité des destinations Outre-mer pour atténuer les effets de la crise sanitaire sur le transport aérien. Avec la mise en place de la septaine, les compagnies accusent le coup et s’enfoncent dans un épais brouillard.

En cette année de très fortes turbulences dans le ciel mondial, les destinations Outre-mer ont affiché, jusqu’ici, une attractivité à faire pâlir de jalousie bien des compagnies aériennes dans le monde. Mais la situation pourrait bien évoluer à son désavantage dans les prochaines semaines. La mise en place de la septaine dans les Outre-mer, après la hausse constatée des cas Covid et la détection de variants, font craindre un sérieux coup de frein à cette dynamique.  

L'attractivité des destinations Outre-mer a explosé

La Guadeloupe, la Martinique et La Réunion ont été les destinations phares des Français pour les fêtes de fin d'année et la ligne Paris-Pointe-à-Pitre à même réussi à se hisser au 4e rang mondial des lignes aériennes les plus importantes en nombre de sièges au mois de janvier. "Pour les Français de l’Hexagone, aller en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane ou à La Réunion, c'est une destination lointaine, c’est dépaysant et cela permet de rester dans les frontières françaises. En cas de problèmes de santé, ils disposent par exemple d'infrastructures hospitalières françaises. De ce fait, c'est une destination perçue comme étant peu risquée, donc il y a une augmentation de la demande pour ces destinations", précise Paul Chiambaretto.

Le coup de frein de la septaine 

Avec la septaine, les cartes sont rebattues. Les voyageurs qui se sont déplacés en masse aux Antilles ou à La Réunion durant cette période de Noël vont sans doute renoncer face aux contraintes sanitaires et à la crainte de voir leur vol annulé ou reporté.

Désormais, le trafic loisirs devient ingérable. Les personnes qui avaient prévu de passer une semaine ou dix jours en Martinique, à La Réunion ou en Guadeloupe en février ou en mars n'ont pas envie de passer sept jours en isolement dans un hôtel. Cela réduit totalement l'attractivité de ces destinations.

Paul Chiambaretto, économiste, directeur de la Chaire Pégase

 

Les Outre-Mer ont réussi à garder une activité d'un peu plus de la moitié par rapport à 2019 (54,7 %). Habituellement les destinations Outre-mer représentent environ 4 % du trafic des aéroports parisiens, contre 8 % cette année. Avec la septaine imposée à l'arrivée, les voyageurs risquent de renoncer. 

"Avant même la mise en place de cette nouvelle contrainte, les voyageurs ont pris l’habitude, depuis le début de la crise sanitaire de réserver de plus en plus tard. Aujourd’hui, 30 % des billets sont réservés dans les dix jours avant le vol. Les touristes craignent l’annulation ou le report des vols et veulent diminuer les risques », Paul Chiambaretto.

Chute vertigineuse des aéroports parisiens

Si les destinations Outre-mer ont jusqu'ici bien résisté, le trafic aérien au départ des aéroports parisiens accuse une chute vertigineuse de 69,4 % l'année dernière. Le "hub" de Paris-Charles de Gaulle n'a accueilli que 22,3 millions de passagers, soit 70,8 % de moins qu'en 2019, et l'aéroport d'Orly, 10,8 millions (-66,1 %), précise le groupe ADP.

Le trafic international (hors Europe) est à Paris en retrait de 70,6% avec une baisse marquée sur l'Amérique du Nord (-80 %) et l'Asie-Pacifique (-79,9 %) mais aussi le Moyen-Orient (-70,9 %) et l'Amérique Latine (- 70,6 %). L'Afrique a enregistré un recul un peu moindre (-65,8 %). 

Le secteur du transport aérien est l'un des plus affectés au niveau mondial par le coronavirus en raison des restrictions de circulation et fermetures de frontières mises en place pour limiter sa propagation.

La pandémie a fait chuter de 60 % le nombre de passagers des compagnies aériennes dans le monde en 2020 et les perspectives à court terme restent sombres. Le nombre de passagers, qui a atteint 1,8 milliards en 2020, est retombé au niveau de 2003, loin des 4,5 milliards de 2019, a précisé l'agence spécialisée des Nations unies.

"Le meilleur moyen pour que le transport aérien reparte, c'est de retrouver de la stabilité sur les frontières, sur la programmation des vols et évidemment sur la pandémie. Le secteur peut s'accommoder de contraintes stables, mais en aucun cas d'incertitudes", conclue Paul Chiambaretto.