Suppression du droit du sol à Mayotte : la gauche critique, la droite revendique l'idée, l'extrême-droite veut aller plus loin

De gauche à droite, de haut en bas : Eric Ciotti, Marion Maréchal, Manon Aubry, Stanislas Guerini.
De nombreuses personnalités politiques ont réagi à l'annonce de la suppression à venir du droit du sol à Mayotte, faite par Gérald Darmanin dimanche. Si tous les membres de l'opposition critiquent l'annonce du gouvernement - soit parce qu'elle arrive trop tard, soit parce qu'elle remet en cause les principes de la République -, la droite et l'extrême-droite se satisfont de cette restriction.

"ENFIN !", a tweeté le président du parti Les Républicains, Eric Ciotti, dimanche, après l'annonce par Gérald Darmanin de la suppression totale du droit du sol à Mayotte. Comme avec M. Ciotti, c'est surtout vers la droite du spectre politique qu'il fallait regarder pour déceler une certaine satisfaction concernant les mesures avancées par le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer.

Arrivé dimanche 11 février sur le territoire français de l'océan Indien, Gérald Darmanin a énoncé un ensemble de mesures drastiques pour lutter contre l'immigration irrégulière, espérant ainsi faire redescendre la température à Mayotte, alors que des collectifs citoyens bloquent les routes de l'île depuis plusieurs semaines. Ces habitants critiquent l'inaction de l'État face à l'insécurité galopante et l'immigration clandestine.

"Une révision constitutionnelle fera qu’il ne sera plus possible de devenir Français à Mayotte si on n’est pas né de parents français", a ainsi promis M. Darmanin, accompagné de la nouvelle ministre déléguée chargée des Outre-mer, Marie Guévenoux.

Une idée venue de la droite

Le député mahorais Mansour Kamardine (Les Républicains) a salué "les annonces fortes de Gérald Darmanin", appelant l'exécutif à aller vite sur cette réforme : "Nous demandons au gouvernement d’inscrire la modification constitutionnelle autorisant la suppression du droit du sol à Mayotte dans le projet de loi constitutionnel sur la Nouvelle-Calédonie dont l’examen est prévu au Parlement le mois prochain", a-t-il réclamé dans un communiqué.

Plusieurs parlementaires Les Républicains ont, à l'instar de Mansour Kamardine, salué l'annonce de Gérald Darmanin. Mais ils se sont néanmoins montrés critiques, estimant que l'idée était la leur et que le pouvoir en place n'a pas agi assez rapidement. Les sénateurs Bruno Retailleau et Valérie Boyer ont tous les deux souligné sur X (ex-Twitter)  qu'"on aurait pu s'épargner du temps si le Sénat avait été écouté". "Nous avions durci le droit du sol lors de la loi immigration alors que le gouvernement ne l'avait pas prévu", rappelle le chef de file des sénateurs de droite.

À l'extrême-droite, les figures du Rassemblement national et de Reconquête ont, eux aussi, salué cette mesure radicale visant à serrer la vis sur la politique migratoire à Mayotte. Mais selon eux, il faut aller plus loin et généraliser cette réforme à l'ensemble du territoire.

Marion Maréchal, tête de liste Reconquête pour les élections européennes du mois de juin, a cependant dénoncé sur BFM TV une des mesures annoncées par le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer à Mayotte. Ce dernier a promis la fin de la territorialisation des titres de séjour, qui empêchait les personnes en situation régulière de se rendre dans l'Hexagone, une exception propre au territoire mahorais. "Gérald Darmanin est en train d'organiser le transfert de l'immigration de Mayotte vers la métropole", a fustigé la nièce de Marine Le Pen.

Une mesure "extrêmement dangereuse" selon la LDH

À gauche, de l'autre côté du spectre politique, les critiques sont quant à elle mordantes contre le gouvernement. "Est-ce que la révision constitutionnelle du droit du sol que propose M. Darmanin va changer quoique ce soit à la situation à Mayotte ? (...) Je ne le crois pas", a réagi le chef des députés socialistes Boris Vallaud sur France 3, plaidant plutôt pour davantage d'investissement dans les services publics et une meilleure coopération régionale avec les Comores.

"Mettre fin au droit du sol à Mayotte ne résoudra pas les difficultés du territoire, mais cela vient abîmer notre République", pense aussi Marie Toussaint, tête de liste des Écologistes pour les Européennes. Sur X, elle estime que "la démolition de nos valeurs par un président de la République qui devance l'extrême droite est un recul terrible". L'eurodéputée La France insoumise Manon Aubry, elle aussi candidate aux élections européennes, fait également le parallèle entre la politique du gouvernement et les idées d'extrême-droite défendues par Marine Le Pen.

Sur Franceinfo, le président de la Ligue des Droits de l'Homme, Patrick Baudouin, juge cette réforme constitutionnelle à venir "extrêmement dangereuse". "Il faut rappeler que c'est vraiment une remise en cause d'un droit fondamental qui existe en France depuis 1804 et Napoléon", souligne-t-il. 

Au sein de la majorité, très peu d'élus ont réagi aux annonces de Gérald Darmanin. Seul Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publique, a assuré sur France Inter à la mi-journée que c'était "une mesure réclamée unanimement par les élus du territoire mahorais", défendant sa légitimité. "Ça sera fait dans le respect de l'état de droit", promet-il, alors que la gauche fustige que des mesures d'exception soient prises pour ce territoire d'Outre-mer.

"La France, ce n'est pas seulement un territoire", a plaidé le député La France insoumise Eric Coquerel sur Franceinfo, c'est aussi "des principes et notamment des principes républicains" dont "celui du droit du sol qui nous oppose à tous les pays qui ont des conceptions ethniques de la Nation".