"À un moment donné, il faut arrêter de parler et passer à l’action", le cri d’alerte des élus d’Outre-mer à l’ouverture du congrès des maires

La première journée du 106e congrès des maires était consacrée à l'Outre-mer.
Ce lundi 18 novembre, le 106ᵉ congrès des maires s’est ouvert avec la rencontre des élus d’Outre-mer au Palais des Congrès d’Issy-les-Moulineaux à Paris. Confrontés à de nombreuses crises, les élus ultramarins ont tiré la sonnette d’alarme.

Crise institutionnelle en Nouvelle-Calédonie, sécheresse en Guyane, vie chère en Martinique, crise de l’eau en Guadeloupe et migratoire à Mayotte, les Outre-mer sont au bord de l’implosion. "On a disparu des médias, mais on a une bombe sociale qui est en train de se créer et on s’attend à des révoltes de la faim dans les mois à venir"avertit Florence Rolland, la maire de la Foa en Nouvelle-Calédonie.

Pour tenter d’apporter des solutions, la première journée du 106ᵉ congrès des maires était consacrée aux Outre-mer. Au Palais des Congrès d’Issy-les-Moulineaux, ils étaient des milliers d’élus ultramarins à s’être réunis pour l’occasion. S’ils sont tous d’accord sur la nécessité de se retrouver, beaucoup ont regretté l’absence des ministres ou de représentant de leurs cabinets. Une chaise vide a cristallisé les débats, celle du ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet. "Le congrès des maires n’a pas été fixé hier" peste Woullingson Raufauore maire de Maupiti en Polynésie. "Chaque année, nous venons au congrès des maires et il y a une journée Outre-mer et à chaque fois ça se passe entre nous. On se répète les mêmes choses, tonne de son côté Georges Elfort, maire de Saint-Georges en Guyane. J’aurais voulu que nous ayons en face des ministres ou bien des cabinets de ministre pour que nous puissions poser les vraies problématiques."

Georges Elfort, maire de Saint-Georges en Guyane.

Le ministre des Outre-mer, a bien fait le déplacement, mais il est arrivé sous les coups de 12 h 30 et il a vu plusieurs élus quitter leur siège pendant son discours. Imperturbable, le locataire de la rue Oudinot a récité son discours devant un auditorium médusé et inquiet. " On discute des problématiques des Ultramarins et on a vu le caractère un peu décalé du discours du ministre avec les propos qui ont été dits dans la journée. C’est une réalité, on discute entre nous, avec quelques parlementaires, mais pour l’essentiel, on est entre nous. Donc dans ces conditions, c’est un peu difficile de faire appréhender la nature, la complexité et l’acuité de ces problèmes à des acteurs qui ne sont jamais là", avance Didier Laguerre, maire de Fort-de-France en Martinique.

Moins de paroles, plus d'actes

Depuis des années en Guadeloupe la population fait face au manque d’eau, la crise touche aussi Mayotte. Depuis quelques semaines, face à la forte sécheresse, la Guyane est aussi exposée. Les élus tirent la sonnette d’alarme. "Lorsque j’entends la France qui se targue d’être dans tous les Outre-mer et que derrière ça, il n’y a rien qui avance, je ne comprends pas, lance Georges Elfort. 

On voit que pour l’Ukraine il y a des millions qui sont engagés alors que pour nous, il n’y a rien… Il faut un plan Marshall.

Georges Elfort

Le niveau historiquement bas des deux fleuves en Guyane, le Maroni et l’Oyapock ont accentué l’enclavement des communes de l’intérieur. "La bouteille de gaz est à 100 euros, des enfants ne peuvent pas aller à l’école, on a des difficultés sur l’eau potable, à un moment donné, il faut que ça s’arrête, il faut un plan Marshall pour la Guyane. Je ne suis pas le premier à la dire, mais à chaque fois, on est là et on nous sort des plans" continue l’élu, maire de la commune de Saint-Georges. "À un moment donné, il faut arrêter de parler et passer à l’action" lance Woullingson Raufauore maire de Maupiti. 

L'argent, le nerf de la guerre

En Polynésie, les doléances sont sensiblement les mêmes qu'en Guyane. "On a besoin d’aide de l’état, il faut qu’il nous soutienne financièrement. En Polynésie française, il n’y a que 10 communes sur les 48 qui distribuent de l’eau potable, on est loin du compte. Il faut que l’État nous fournisse des techniciens sérieux pour que nous puissions aller au bout de nos captations" poursuit Woullingson Raufauore . Un cri d’alerte également partagé par les élus calédoniens présents. "Les 33 communes de la Nouvelle-Calédonie sont en situation de faillite et nous attendons concrètement l’aide de l’état pour pouvoir tenir des budgets et avoir de la visibilité sur 2025", déclare Florence Rolland, maire de La Foa en Nouvelle-Calédonie. Depuis le 13 mai, l’archipel est plongé dans une crise sans précèdent.

"Notre objectif en venant ici [congrès des maires, NDLR] c’est de continuer de mettre en avant la situation critique dans laquelle se trouve la Nouvelle-Calédonie." 

Florence Rolland

Chaque élu présent essaye de monter au front dans l’espoir d’obtenir des avancées, d’autres plus pragmatique n’attendent rien ou pas grand-chose de ces débats par peur d’être déçus. "C’est une grande messe, c’est une occasion pour les élus de se rencontrer et de partager leurs expériences, mais pas nécessairement pour avoir des réponses précises aux problématiques qui se posent sur nos territoires. Si on le prend comme ça, on ne peut pas être déçu, fait savoir Harry Durimel, maire de Pointe-à-Pitre en Guadeloupe. Le ministre est venu, il a lu sa déclaration protocolaire, mais ça fait quatre mois qu’il est en poste, mais je ne pense pas qu’il ait des réponses pour les problèmes qui se posent à nous.

Harry Durimel maire de Pointe-à-Pitre en Guadeloupe, avec le ministre des Outre-mer François-Noel Buffet à l'occasion du 106ᵉ congrès des maires.

Le congrès des maires se poursuit, dès ce mardi les élus ultramarins seront reçus à la salle d'exposition de la Porte de Versailles. Le thème de cette année est "les communes… Heureusement ! " de quoi faire réfléchir sur la place des villes face aux problématiques du moment.