Le constat est sans appel : les Etats doivent réagir, et vite. Dans son dernier rapport publié ce lundi, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), tire la sonnette d’alarme. Sauf réaction rapide de la part de la communauté internationale, l’objectif fixé par les Accords de Paris en 2016 de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C d’ici la fin du siècle est déjà hors de portée. “Il est probable que le réchauffement planétaire atteindra 1,5 °C entre 2030 et 2052 s’il continue d’augmenter au rythme actuel”, prévient le rapport. À l’origine de ce réchauffement accéléré : l’activité humaine, “c’est sans équivoque”, insistent les experts climat de l’ONU.
Une montée des eaux “irréversible”
Certaines conséquences directes de la hausse des températures sont déjà irréversibles, “pour des siècles ou des millénaires”, quels que soient nos efforts pour réduire les gaz à effet de serre, indique le rapport. Le niveau de la mer pourrait ainsi gagner jusqu’à un mètre d’ici 2100. Et les territoires d’Outre-mer sont en première ligne face à cette catastrophe écologique.
L’intensification du réchauffement de la planète amplifie “l’exposition des petites îles aux risques liés à l’élévation du niveau de la mer (accroissement des invasions d’eau salée, des inondations et des dégâts causés aux infrastructures)”, rappelle ainsi le rapport. Des risques qui seront d’autant plus élevés si le réchauffement atteint les +2°C d’ici la fin du siècle. Respecter la limite des +1,5 °C, permettrait de gagner du temps et de développer de meilleures possibilités d’adaptation, “notamment pour ce qui concerne la gestion et la remise en état des écosystèmes côtiers naturels et le renforcement des infrastructures”, nuancent toutefois les experts. Trop tard pour stopper l’inexorable montée des eaux donc. Mais il est encore possible de composer avec.
Dans les Outre-mer, cette progression des océans diffère selon les territoires. Certains voient déjà leurs terres se faire progressivement grignoter par les vagues. La Martinique pourrait ainsi perdre 5% de sa superficie d’ici 2100 sous l’effet combiné de l'érosion et de la montée des eaux. Les îles françaises du Pacifique sont également directement concernées. “Sur les 120 îles totalement submergées d'ici la fin du siècle dans le scénario optimiste, on a à peu près 30% qui viennent de Nouvelle-Calédonie, 30% de Polynésie française”, confiait déjà Franck Courchamp, docteur en écologie et directeur de recherche au CNRS, à Outre-mer la 1ère en 2019.
Catastrophe pour les coraux
Pour le Giec, un réchauffement planétaire de 1,5 °C aura pour conséquence le déplacement de nombreuses espèces marines et l’aggravation de “dommages” infligés à de nombreux écosystèmes. Le secteur de la pêche, qui tient notamment une place importante au sein de l’économie polynésienne, serait ainsi directement impacté. Un phénomène amplifié par l'acidification des océans, dû à l'augmentation de la concentration de CO2 dans l’eau.
Un modèle mondial des pêcheries a, par exemple, projeté une diminution des prises annuelles mondiales pour les pêches maritimes d’environ 1,5 million de tonnes en cas de réchauffement planétaire de 1,5 °C et de plus de 3 millions de tonnes en cas de réchauffement de 2 °C.
- Rapport du Giec 2021
La dégradation des récifs coralliens devrait elle aussi se poursuivre et toucher 70 à 90 % d’entre eux en cas de réchauffement planétaire de 1,5 °C, alertent les experts. Ces pertes seront encore plus importantes (supérieures à 99 %) en cas de réchauffement de 2 °C. Un scénario catastrophe pour ces écosystèmes vitaux pour les territoires d’Outre-mer. Protection contre la houle, diminution des risques liés aux tempêtes, sources de nourriture… Les récifs coralliens sont de véritables trésors qui pèsent près de 1,3 milliard d’euros dans l’économie ultramarine selon l’Ifrecor (2011-2015).
Des cyclones plus intenses
La Terre devrait connaître une hausse “sans précédent” des événements météo extrêmes, même si l'on parvient à limiter le réchauffement à 1,5°C, prévoit le rapport. Les épisodes de canicule, de pluies diluviennes mais aussi de cyclones tropicaux devraient s’intensifier au fil des ans.
Même si certains changements climatiques sont déjà irréversibles, il n’est pas trop tard pour agir et la balle est dans le camp des Etats, estiment les experts du Giec alors que la Cop26 (conférence internationale sur le réchauffement climatique) s’ouvre dans quelques mois en Ecosse.
Les risques futurs liés au climat seraient réduits par l’amplification et l’accélération de mesures d’atténuation des effets du changement climatique à grande échelle.
-Rapport du Giec 2021
Un deuxième volet de ce sixième rapport, axé sur les solutions pour atténuer le changement climatique, paraîtra début 2022.