Chômage, écoles, accord, nickel… Ce qu’on peut retenir des annonces et déclarations faites par le ministre des Outre-mer à Nouvelle-Calédonie la 1ère

François-Noël Buffet invité du JT ©NC la 1ère
Avant son départ de Nouvelle-Calédonie ce week-end, le ministre des Outre-mer accordait un entretien à NC la 1ère, vendredi soir. François-Noël Buffet annonce que Paris travaille à "accompagner" le prolongement du chômage partiel spécifique jusqu'au mois de décembre. Il évoque l'aide de l'État, le report des provinciales, sa vision d'un accord global ou encore la filière nickel.

Immersion dans une Calédonie fracturée et meurtrie, pour François-Noël Buffet. À la veille de son départ, le ministre des Outre-mer a livré des bribes de son constat, ses engagements et sa méthode pour le Caillou. Il était invité dans l’édition spéciale de NC la 1ère, vendredi 18 octobre. Voici ce qu’on peut en retenir.

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"Préoccupation"

L’ancien président de la commission des lois du Sénat, alors partie prenante d’une mission sur l’avenir institutionnel, parle toujours d’une solution qui repose sur les partenaires politiques locaux et le fait de s’accorder "un temps suffisant". "Je suis venu [en] mars. Je sentais qu'il y avait des choses qui se passaient, une tension", confie-t-il. Après trois jours de visites au pas de course, "je vous dis ma préoccupation (…) Je suis convaincu que la Nouvelle-Calédonie est à un moment charnière de son histoire."

Soit les personnalités de ce territoire arrivent à travailler ensemble. L’État dira ce qu'il veut, accompagnera, une fois que tout le monde sera d'accord. Et la Nouvelle-Calédonie redémarrera, positivement. Soit nous avons un risque d'écroulement, économique, avec les conséquences sociales que nous ne souhaitons pas.

François-Noël Buffet, ministre des Outre-mer, le 18 octobre 2024

Et de poser : "Le moment est au retour du dialogue, de la discussion, de l'échange, après ces évènements terribles pour ne pas dire effroyables."

Le chômage partiel jusqu'en décembre ?

D'ici là, les Calédoniens attendent de Paris des réponses immédiates. Aussi bien la population en général, que les professionnels et les institutions. "On va essayer d'aider le monde économique de deux façons, résume le membre du gouvernement Barnier. D'abord en donnant aux collectivités les moyens suffisants pour honorer les engagements avec leurs fournisseurs, et qu'elles puissent se remettre à flot pour éviter de couler. Ça redonne au tissu économique de l'argent, du travail. Et aux salariés, un emploi." Ensuite, "sur le sujet du chômage partiel, on va accompagner jusqu'en décembre" le dispositif spécifique aux conséquences des émeutes, qui "doit s'arrêter en principe en octobre". Du moins, "on travaille d'arrache-pied à un prolongement". Environ vingt mille Calédoniens sont concernés. 

La reconstruction des écoles couverte "à 100 %"

Globalement, "l'effort est considérable", insiste-t-il. "Sur l'année 2024, 78 milliards de francs CFP sont mobilisés jusqu'au mois de décembre pour aider exceptionnellement la Nouvelle-Calédonie. Pour 2025, on est à peu près à une estimation de 80 milliards, auxquels il faut ajouter l'ouverture d'un droit de tirage." Traduction : "pour aider les communes à reconstruire les écoles ou les bâtiments publics, l'État financera en plus à 100 % la reconstruction des écoles, et à 70 % le financement des bâtiments." En temps normal, les établissements scolaires sont construits à travers les contrats de développement et c’est un financement partagé.

"Il faut que les assureurs se mobilisent"

Il est aussi prévu "une mission composée de techniciens, trois ou quatre, dont la vocation est de s'assurer que les fonds mis à disposition seront rapidement utilisés pour relancer les opérations et aider les collectivités locales, le gouvernement et l'ensemble des intervenants". Par ailleurs, "on a un sujet avec les assureurs, confirme-t-il. S'ils nous entendent je voudrais leur dire que les entreprises ont besoin de leur engagement. Bien sûr que les mesures d'expertises sont en cours, elles sont longues. Mais les fonds déjà versés sont insuffisants pour pouvoir commencer à reconstruire l'immobilier des entreprises. Il faut qu'ils se mobilisent."

Autre annonce, "pour aider les entreprises à obtenir des concours bancaires, on va travailler sur une garantie qui puisse être donnée par l'État pour faciliter les choses".

"Accélérer" le dossier nickel

Les interlocuteurs du ministre ont alerté sur la situation désastreuse de la filière nickel. "C'est la crise dans la crise, réagit-il. Antérieure aux émeutes quoique, sur la commune de Thio, si les installations industrielles sont fermées, c'est aussi parce qu'elles ont été détruites." Sur le sujet, "il faut accélérer, dit-il. Je regrette que le pacte proposé, et qui était sur le point d'être signé, ne l'ait pas été. Le gouvernement va relancer [le dossier] pour essayer de trouver des solutions assez vite. Il faut rediscuter sans doute d'un certain nombre de conditions. Il faut par ailleurs trouver des candidats qui ont envie de reprendre les installations, trouver des accords avec les responsables locaux…"

Des provinciales reportées pour apaiser

Durant ce déplacement, le ministre des Outre-mer a défendu le report des provinciales. "Ce qu'il s'est passé au 13 mai change la situation. La crise que vit la Calédonie ne permet pas d'aborder une élection dans de bonnes conditions." Et de rappeler : "Le conseil d’État nous avait indiqué qu'on pouvait reporter les élections jusqu'à la fin de l'année 2025. C'était un élément de tension. On saisit l'opportunité de le faire pour pouvoir apaiser les relations entre tous, et se donner un peu de délais supplémentaires pour renouer le dialogue et tenter de trouver un avenir. Institutionnel bien sûr mais également économique et social."

Prudent sur le corps électoral

Les provinciales dépendent du corps électoral. Le point précis qui a mis le feu aux poudres à la mi-mai. "Le débat s'ouvre sur tous les sujets, y compris sur l'ajustement du corps électoral", confirme le ministre. "Vous dire maintenant, ce qu'il en sera ? Non, je ne peux pas. Ce n'est pas comme ça que nous voulons fonctionner. Nous voulons plutôt nous assurer que les acteurs locaux arrivent à échanger sur ce point, et sur tous les autres". 

Le souhait du gouvernement est un projet global. C'est un projet qui place la Nouvelle-Calédonie dans un avenir de moyen et long terme.

François-Noël Buffet

"Ce n'est pas maintenir la paix par la force"

Le déploiement massif de forces de l'ordre sera-t-il maintenu jusqu'à ces élections ? "Ce que je souhaite, c'est que le haut-commissaire garde tous les moyens d'action sur le territoire tant que les choses ne sont pas rentrées dans l'ordre normal." La paix maintenue par la force, en quelque sorte ? Le ministre des Outre-mer s'inscrit en faux. "Les forces de l'ordre n'ont jamais demandé à être caillassées, visées par des fusils, tuées. [Elles] sont là pour faire respecter l'ordre républicain qui profite à tout le monde. Mais ce n'est pas exclusif. D'autres solutions sont engagées, beaucoup plus [en profondeur]."

Une mission pour prendre de l'avance

La présidente de l'Assemblée nationale et son homologue du Sénat sont attendus "fin du mois, début du mois prochain" pour une mission de concertation. "Les deux présidents doivent venir faire un travail de constat, d'analyse, de discussion sur tous les sujets qu'ils souhaiteront. Pourquoi eux ? Parce que, si nous arrivons, dans le processus, à trouver cet accord souhaité par le gouvernement, il aura un volet législatif et peut-être même constitutionnel." 

Saint-Louis, ou encore la vie chère

Dans l'immédiat, le Sud de la Grande terre reste isolé par l'insécurité dans la traversée de Saint-Louis. "L'urgence est vraiment qu'on retrouve une situation normale. C'est inacceptable mais nous sommes mobilisés pour tenter de mettre fin enfin définitivement à cette situation", déclare François-Noël Buffet. Confirmant que l'État va aider la province Sud à payer "les navettes maritimes d'urgence".

Dernier sujet abordé, la vie chère, à l'origine d'autres émeutes en Martinique. Un accord y a été signé entre les autorités et la grande distribution sur environ six mille produits de la vie courante. "C'est un bel accord, qui va permettre aux Martiniquais de bénéficier d'une baisse de prix de l'ordre de 20 %", commente le ministre. "Ce qui va se faire là-bas, va être regardé ici".