De La Réunion aux Îles Éparses : quatre peintres de la Marine à bord de l'Astrolabe

L'Astrolabe, brise-glace de la Marine parcourant les TAAF, au départ de Concarneau, dans l'Hexagone, le 13 juillet 2017.
Nicolas Vial et trois autres artistes vont embarquer lundi 25 avril à bord du brise-glace de la Marine nationale pour une mission de 26 jours. Avec les marins et scientifiques présents sur le bateau, ils vont parcourir les atolls isolés des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) situés autour de Madagascar.

"Au départ, je croyais que j'allais aller en Antarctique", plaisante Nicolas Vial, en pleine préparation de ses valises. Raté, ce sera direction les Îles Éparses. Le Parisien de 66 ans regroupe pinceaux, peinture et crayons avant le grand départ pour l'Astrolabe, ce brise-glace reconnaissable par sa coque rouge appartenant aux Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), à l'Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV) et au Ministère de la Défense (la Marine nationale).

Du 25 avril au 21 mai, le navire - rentré à bon port à La Réunion début avril après plus de cinq mois en Antarctique - va s'élancer pour une nouvelle mission vers les Îles Éparses, situées autour de Madagascar. À son bord : une soixantaine de marins et de scientifiques... et quatre peintres officiels de la Marine.

Nicolas Vial, peintre et dessinateur de presse.

Peintre de la Marine : un titre prestigieux depuis 1830

Nicolas Vial est l'un d'entre eux. Illustrateur de presse et peintre depuis 1982, il a intégré ce corps honorifique en 2008. Depuis, il peut embarquer à bord de tous les navires de la Marine nationale - et a même le droit de porter l'uniforme des marins.

Un jour, un de mes amis, qui est écrivain de Marine, est venu me voir dans mon atelier avec son manteau d'officier de Marine. Je lui ai dit : "Putain ! Il est beau ton manteau, on dirait Corto Maltese !". Il m'a répondu : "T'es con, tu serais peintre de la Marine, tu aurais le même." Donc je me suis présenté et j'ai été élu.

Nicolas Vial, peintre officiel de la Marine

Depuis 1830, le titre de Peintre officiel de la Marine récompense les artistes consacrant leur art à la mer. Qu'ils soient peintres, sculpteurs, photographes ou même cinéastes, ces hommes et femmes, qui obtiennent le statut de militaire d'active, se voient offrir l'opportunité de monter sur n'importe quel bateau militaire - porte-avions, porte-hélicoptères, croiseur... - pour créer, dessiner ou tout simplement trouver l'inspiration. L'année dernière, la Saint-Pierraise Raphaële Goineau est devenue membre de ce club très sélectif.

Oeuvre de Nicolas Vial.


Être peintre de la Marine n'implique aucune obligation - hormis la contrainte de devoir présenter une œuvre récente au Salon de la Marine, qui a lieu tous les deux ans. "Tous les mois, on reçoit une liste des navires qui veulent nous prendre", explique Nicolas Vial. Dans son cas, l'Astrolabe va être le premier bâtiment sur lequel il a décidé de monter. "On a l'occasion d'aller partout dans le monde, sur des bateaux que j'appelle des bateaux gris, c'est-à-dire des bateaux militaires." Le rouge vif de l'Astrolabe"navire moitié militaire, moitié scientifique", a avivé sa curiosité.

Quatre missions d'île en île

Accompagné de Jean Lemonnier (sculpteur), d'Anne Smith et Olivier Desvaux (peintres), Nicolas Vial s'est vu confié quatre missions. Pendant un mois, il va photographier et dessiner l'équipage du navire, la mer, les îles... À son retour, il publiera ses carnets de voyage dans un livre aux éditions du Chêne ; il racontera son voyage dans un reportage pour le magazine spécialisé Chasse-Marée (où il est déjà dessinateur régulier) ; pendant son périple, il tiendra une correspondance avec un blog du site Lemonde.fr ; et il sera en contact permanent avec le musée de la Marine, qui relaiera ses dessins sur ses réseaux sociaux.

Oeuvre originale de Nicolas Vial.


Les navigateurs vont faire escale sur les Îles Éparses, des archipels français inhabités, mais riches en biodiversité, éparpillées autour de Madagascar, dans l'Océan indien. L'Astrolabe, qui passe sa majeure partie de l'été austral en Antarctique pour transporter du fret et des scientifiques entre l'Australie et la base scientifique française en terre Adélie, remplit également des missions de souveraineté pour l'armée française. Sa présence autour des Îles Éparses permettra à la France de s'assurer qu'aucun État ne viole ses eaux territoriales - les atolls étant au cœur d'un contentieux de longue date avec Madagascar - et de lutter contre la pêche illégale. Après 26 jours en mer, Nicolas Vial et les trois autres peintres de la Marine débarqueront sur la terre ferme les valises remplies de croquis.