"Le projet de la relocalisation du village de Miquelon a été entendu jusqu’au plus haut sommet de l’État", se félicite Franck Detcheverry, le maire de Miquelon-Langlade, qui demandait depuis avril dernier la tenue d'une réunion interministérielle sur le sujet. La réunion en question a eu lieu lundi 27 novembre à l’Élysée, en présence de son homologue de Saint-Pierre, Yannick Cambray, de leurs adjointes, et de la sénatrice de Saint-Pierre et Miquelon, Annick Girardin. De l'autre côté de la table étaient présents les conseillers Outre-mer et environnement d’Emmanuel Macron, mais également des représentants des cabinets de la Première ministre, du ministère de l’Écologie et de celui des Outre-mer.
L’archipel de Saint-Pierre et Miquelon est en première ligne face au réchauffement climatique. L'hiver 2022 y a par exemple été bien moins rigoureux que la moyenne : 0,8 degrés sur la période, contre - 3,4 degrés d'ordinaire. Le village de Miquelon et ses 600 habitants, menacés par la montée des eaux, pourraient finir submergés.
Nous pensons, plutôt que d’essayer de lutter contre les éléments indéfiniment et de dépenser beaucoup d’argent public sur le sujet, que la relocalisation, le déplacement des populations est la solution pérenne pour que les personnes puissent vivre sur leur territoire de façon sécuritaire.
Franck Detcheverry, maire de Miquelon-Langlade
Des "garanties" promises par l'État
En juillet dernier, le gouvernement avait promis une enveloppe d’1,5 million d’euros pour déplacer le village dans une zone plus sûre. Une somme insuffisante selon Franck Detcheverry, qui sort néanmoins rassuré de la réunion à l’Élysée. "Ce n’est pas suffisant, mais le gouvernement en a pleinement conscience. On a eu la garantie que l’État nous suivrait sur le sujet", poursuit-il.
Les enveloppes successives serviront dans un premier temps à financer des mesures d'urgence, notamment pour accompagner les primo-accédants, qui peinent à s'installer, et pour indemniser les "pionniers", ces réfugiés climatiques qui choisissent de s'installer sur la nouvelle zone. À moyen terme, les sommes serviront à aménager l'espace qui accueillera l’intégralité du village dans les prochaines décennies.
Si des garanties ont été données, les sommes n’ont pas encore été fixées. "On n’a pas de chiffres à donner. Il faut un mois ou deux encore pour encadrer financièrement le projet", détaille la sénatrice Annick Girardin, venue "soutenir le maire de Miquelon-Langlade" face à un "double défi". "Le défi de protéger sa population sur le site actuel (...) de continuer à faire des projets sur le village actuel, (...) et puis en même temps de porter ce projet de délocalisation, de construction d’un nouveau village", précise-t-elle.
J’ai tenu à apporter mon soutien pour un dossier qui est vital, novateur et ambitieux. (…) Je crois que tout ce travail qui a été fait pour faire participer la population à ce déplacement est exemplaire.
Yannick Cambray, maire de Saint-Pierre.
Un délégué interministériel bientôt nommé
Le maire de Miquelon-Langlade, venu à Paris avec trois demandes principales, sort satisfait des échanges puisque l'ensemble de ses requêtes ont été acceptées. Il s’agissait à la fois de "garantir les financements du projet", de s’assurer que "la population ne soit pas lésée, (...) que les indemnisations soient à la hauteur des attentes" et de "nommer un délégué interministériel" sur la question. Rattaché à la Première ministre, ce dernier sera chargé du suivi du dossier à Paris. Il devra notamment faire le lien entre les différents ministères impliqués pour "débloquer les verrous rapidement", selon les mots de l’ancienne ministre des Outre-mer, Annick Girardin.
Mais la rencontre élyséenne ne fait pas l’unanimité. Dans un communiqué, le député Stéphane Lenormand regrette que l’Élysée "a refusé que le Président de la Collectivité de Saint-Pierre et Miquelon assiste, en visioconférence, à la réunion". L’élu, qui a décidé de bouder la rencontre "par solidarité", précise néanmoins ses priorités : protéger Miquelon des risques de submersion, sécuriser l’infrastructure portuaire du village, et consolider l’isthme. Lui aussi demande à ce que soient rapidement précisées les conditions d’indemnisation des réfugiés climatiques et réglée la question de l’accompagnement des primo-accédants.
Les premiers déplacements de populations, qui se feront sur la base du volontariat, sont prévus pour le deuxième semestre 2024.