"L'aide à Mayotte sera possible" : l'Assemblée nationale adopte une loi spéciale pour permettre à l'État de fonctionner sans budget à partir du 1ᵉʳ janvier

Les ministres démissionnaires de l'Économie, Antoine Armand, et du Budget, Laurent Saint-Martin, à l'Assemblée nationale, le 16 décembre 2024.
Les députés ont unanimement voté en faveur de la loi spéciale présentée par le gouvernement démissionnaire, lundi 16 décembre, qui permet à l'État de prélever des impôts et engager les dépenses primordiales. L'exécutif pourra par ailleurs débloquer des crédits pour les situations d'urgence, comme à Mayotte, frappée par un cyclone.

Crise économique en Nouvelle-Calédonie. Crise de la vie chère en Martinique. Crise humanitaire à Mayotte. Dans les territoires d'Outre-mer, les dossiers brûlants s'accumulent depuis plusieurs mois, nécessitant l'intervention cruciale de l'État. Or, avec le vote de la censure du gouvernement de Michel Barnier il y a deux semaines et l'arrivée de la fin d'année sans qu'aucun budget pour 2025 n'ait été voté, la pression montait. Comment faire pour subvenir à la continuité de l'État en général, et aux urgences ultramarines en particulier ?

Lundi 16 décembre, l'Assemblée nationale a donc unanimement voté en faveur d'une loi spéciale pour permettre à l'État de continuer à fonctionner correctement au 1ᵉʳ janvier 2025, même sans budget. Les impôts pourront être prélevés. Des dépenses pourront être faites. Ne manque plus que le vote du Sénat, mercredi, pour acter l'adoption définitive du texte.

Les aides d'urgence assurées

Mais, les ministres démissionnaires de l'Économie, Antoine Armand, et du Budget, Laurent Saint-Martin, ont été très clair lors des débats à l'Assemblée nationale : "Il ne s'agit pas du budget 2025". Cette loi permet au pays de ne pas plonger dans l'inconnu en 2025. Mais le gros du travail parlementaire reste à faire. Il faudra attendre la formation du gouvernement par le nouveau Premier ministre François Bayrou.

En revanche, le gouvernement a eu des mots rassurants pour les députés d'Outre-mer qui s'inquiétaient quant à la capacité de l'État de venir en aide aux territoires ultramarins, frappés par les crises. "Sauf nécessité pour la continuité de la vie nationale ou motif d'urgence caractérisé, le gouvernement ne pourra pas (...) procéder à de nouveaux investissements ou des dépenses discrétionnaires de soutien", a indiqué Laurent Saint-Martin à la tribune. Et de préciser, en guise d'exemple : "L'aide à Mayotte sera rendue possible".

Malgré ces assurances, certains appellent déjà le gouvernement à présenter une loi spéciale pour venir en aide aux Mahorais, sinistrés du cyclone Chido. Perceval Gaillard, député LFI de La Réunion, ne veut pas attendre que les discussions sur le projet de loi de finances 2025 reprennent pour débloquer de nouveaux fonds pour Mayotte : "Nous devons avoir une loi spéciale, une loi d'urgence, très rapidement pour débloquer les crédits (...). On fera tout pour que Mayotte soit prise en charge par la solidarité nationale", a-t-il confié à Outre-mer la 1ère à l'issue du vote, lundi.

En Martinique aussi, la population attend l'entrée en vigueur du protocole contre la vie chère, négocié en novembre par l'État, la collectivité territoriale de Martinique et les acteurs économiques, pour permettre de baisser le prix de 6.000 produits de première nécessité dès l'année prochaine. Le budget 2025 du gouvernement ayant été rejeté, l'accord n'entrera pas en vigueur au 1ᵉʳ janvier. Le député martiniquais Jiovanny William (Socialistes et apparentés) espère que le sujet sera remis sur la table rapidement, la question du pouvoir d'achat touchant de nombreux territoires d'Outre-mer. "Il y a une promesse de l'État. L'État devra suivre ses engagements l'année prochaine", dit-il.

Des fonds pour la Nouvelle-Calédonie

L'autre sujet préoccupant concerne la Nouvelle-Calédonie, en proie à une crise économique et sociale sans précédent depuis les émeutes du mois de mai. Le territoire, devenu dépendant des aides de l'État, doit entamer sa phase de reconstruction. Heureusement, une partie des financements promis par l'exécutif ont été inscrits dans le projet de loi de fin de gestion 2024, adopté juste avant la chute du gouvernement de Michel Barnier, le 4 décembre. "On a trouvé une solution pour que, en attendant le budget de l'État, on puisse bénéficier de sa solidarité", se réjouit l'élu calédonien Nicolas Metzdorf (Ensemble pour la République).

Néanmoins, même si l'État sera toujours présent pour répondre aux crises même sans budget voté, le problème des départements, régions et collectivités ultramarines demeure plus profond, et les élus réclament une hausse des crédits consacrés aux Outre-mer. "Il faudra des lois de programmation spécifiques pour nos territoires, par territoire", insiste déjà le Martiniquais Jiovanny William. Au prochain gouvernement de se saisir de la question.