Les Outre-mer, c'est quoi ? La Nouvelle-Calédonie

Vue de Hienghène sur la côte est de Nouvelle-Calédonie
La Nouvelle-Calédonie est une mosaïque de populations : Kanaks, Européens, Wallisiens, Vietnamiens, Chinois. Le territoire est d'abord le berceau mondial de l'industrie du nickel, indispensable à la transition énergétique. le "Caillou" c'est aussi une histoire marquée par des évènements tragiques.

Chef-lieu : Nouméa
Statut : collectivité d’Outre-mer à statut particulier
Zone : Océanie, océan Pacifique
Au nord, les Iles Salomon et la Papouasie-Nouvelle-Guinée
A l’ouest, l’Australie
A l’est, le Vanuatu, les Fidji et Tonga
Au sud, la Nouvelle-Zélande
Paris se trouve à près de 17.000 km
Langues : français et près d'une trentaine de langues locales
Monnaie : franc Pacifique 

La Nouvelle-Calédonie siège en tant que membre à part entière de la Communauté du Pacifique (CPS) et du Forum des îles du Pacifique. Elle n’est pas considérée comme une RUP (région ultrapériphérique) au sein de l’Union européenne, mais bénéficie toutefois de soutiens financiers de l’Europe.
 

Population

Plus de 271.000 personnes vivent sur le territoire dont environ 100.000 résidents à Nouméa. La Nouvelle-Calédonie du fait de son histoire est riche d’une population multiculturelle. Plusieurs peuples se mêlent : Kanaks, Européens, Wallisiens, Vietnamiens, Chinois, descendants d'Arabes et de Kabyles... Il en résulte une richesse de cultures que l’on retrouve dans les cultes, la gastronomie, les modes de vie et les langues. La religion tient un rôle important dans la société calédonienne.
 
Deux communautés prédominent en Nouvelle-Calédonie. Les Mélanésiens, enracinés depuis plus de 2000 ans, et les Européens, présents depuis environ cinq générations. Les autres populations sont de souche plus récente : Asiatiques (Vietnamiens et Indonésiens), Polynésiens (Wallisiens et Futuniens) arrivés au XXe siècle, ainsi qu’une population arabe et kabyle venue du Maghreb. Le nombre d’habitants a enregistré une hausse modérée de la population (+1%) entre 2014 et 2019. De cette étude réalisée par l’Institut d'émission d'Outre-mer (IEOM) ressort également de fortes disparités d’évolutions de la population. L’ouest de la Province Nord, et tout particulièrement la zone Voh-Koné-Pouembout (VKP), a été significativement transformé avec la grande usine de nickel du Nord adossée au massif du Koniambo, qui est le poumon économique et le premier employeur des 45.000 habitants de la région.

Un père et sa fille en Province Nord

 

Histoire

Les premières traces de peuplement humain de la Nouvelle-Calédonie sont attestées sur les littoraux il y a plus de 5000 ans. Ces populations, arrivées par l'est et le nord de l’Océanie au cours d'une lente progression, appartiennent à une civilisation qui s'étend sur toute une partie du Pacifique sud. Les Kanaks ou "hommes libres" sont arrivés dans l’archipel avec le mouvement d’expansion humaine ayant peuplé sur de grandes pirogues à voile l’immensité du Pacifique sud.

La Nouvelle-Calédonie fut découverte par le vieux monde en 1774. Le navigateur James Cook la baptisa ainsi en souvenir de l’ancien nom romain, de son Ecosse natale (Caledonia). En 1853, sous le règne de Napoléon III, l’île devient française. Elle accueillera rapidement les premiers échanges entre autochtones et visiteurs (missionnaires protestants et catholiques...). Dix ans plus tard, elle devient une colonie pénitentiaire pour les condamnés de droit commun ou politiques, comme Louise Michel, révolutionnaire pendant la Commune. L'installation du bagne va de pair avec une expulsion accrue des populations kanaks de leurs terres. Deux grandes révoltes kanaks en 1878 et 1917 sont durement réprimées. Parallèlement, les Européens s’installent en Nouvelle-Calédonie pour développer l’élevage, et le commerce. Cette période explique la grande diversité ethnique du peuplement actuel du territoire.

>>> Documentaire à voir ici : "Nous, gens de la terre". Nouvelle-Calédonie, une terre en partage 

À la fin du XIXe siècle, le sous-sol de la Nouvelle Calédonie révèle de grandes richesses en nickel découvert par le géologue stéphanois Jules Garnier, et les premiers immigrants asiatiques viennent travailler à leur exploitation dans des conditions très dures. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la Nouvelle-Calédonie assume un rôle stratégique dans la Guerre du Pacifique, à la fois base américaine et centre du commandement interallié dans la région. Le boom du nickel (1968-1971) fait entrer la Nouvelle-Calédonie dans une grande période industrielle. 
 
♦ Vidéo : la Nouvelle-Calédonie, une histoire, une culture (archives RFO, janvier 1995)


Au cours des années quatre-vingt, c'est l'explosion des violences. Le 22 avril 1988, deux jours avant le premier tour de la présidentielle dans l'Hexagone, des militants indépendantistes investissent la gendarmerie de Fayaoué, sur l’île d’Ouvéa, avant de se retrancher dans une grotte avec des otages. Un assaut est donné le 5 mai pour les libérer. Au total, cet épisode fait 25 morts (19 preneurs d'otages, quatre gendarmes et deux militaires des forces spéciales), dans des conditions encore troubles. En 1988, les Accords de Matignon signés entre les partis indépendantistes, non-indépendantiste et l'État, instaurent une politique de rééquilibrage, avec la création de trois Provinces et une reconnaissance officielle du peuple kanak. Cependant, le 4 mai 1989, le chef de file du mouvement indépendantiste Jean-Marie Tjibaou et son bras droit au FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste) Yéwéné Yéwéné sont assassinés lors de la commémoration du drame d’Ouvéa.
 

Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur (leader des anti-indépendantistes) à Paris, le 26 juin 1988, lors de la signature des Accords de Matignon


Les Accords de Matignon ouvrent toutefois la voie à la paix et en 1998, ils se prolongent avec la signature de l'Accord de Nouméa qui crée un gouvernement collégial du pays à côté des trois Provinces. Le référendum de 2020 sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie sera un référendum d'autodétermination, dans le cadre de l'Accord de Nouméa. Il s'agira du troisième référendum sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie, après ceux organisés en 1987 et 2018 qui virent la victoire de l’option du maintien au sein de la République française.

Vidéo : retour sur le processus de l'Accord de Nouméa pour la Nouvelle-Calédonie (archives RFO Paris, avril 1998)

Géographie

Lors des glaciations, l’Australie, la Nouvelle-Calédonie et la Tasmanie ne formaient qu’un seul continent. La Nouvelle-Calédonie se sépara et en émergea il y a 100 millions d’années environ. L’archipel est situé à 1500 km à l'est de l'Australie et à 1800 km au nord de la Nouvelle-Zélande, à plus de 600 km de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, à 600 km de l’archipel du Vanuatu, et à environ 17.000 kilomètres de la France. Sa superficie de 18.576 km2 en fait l’un des plus grands territoires du Pacifique Sud et le second de la France d’Outre-mer après la Guyane. La Nouvelle-Calédonie dispose d’une zone économique exclusive de 1.450.000 km2. L’île principale, appelée Grande Terre, forme une bande de 500 kilomètres de long sur une cinquantaine de large ; elle est entourée par les îles Loyauté à l'Est (Ouvéa, Lifou, Tiga, Maré), l’île des Pins au Sud et les Bélep au Nord. Son lagon est le plus grand lagon fermé du monde. En juillet 2008, le classement de six de ses zones coralliennes au patrimoine mondial de l'Unesco a consacré sur la scène planétaire la beauté et la variété des fonds sous-marins calédoniens.
 
Vidéo : la Nouvelle-Calédonie pose un regard vigilant sur la préservation de ses écosystèmes


La Nouvelle-Calédonie jouit d'un climat tropical tempéré, qui alterne périodes sèches et deux saisons des pluies dans l'année. Les températures maximales (au-delà des 30°C) sont enregistrées de décembre à février, qui est également la saison des cyclones. Une barrière montagneuse, la Chaîne centrale, s'élève au centre de la Grande Terre et marque une différence nette de climat entre les deux côtes. Le lagon néo-calédonien a une surface totale de 24.000 km2, ce qui en fait l'un des plus grands lagons du monde. 
 

Mangrove, savane et massif de Poum

 

Economie et nickel 

Un rapide comparatif avec les îles indépendantes du Pacifique permet de mettre en évidence l’ampleur des progrès économiques accomplis au cours des 30 dernières années. La Nouvelle-Calédonie est l’économie ultramarine qui a connu les performances les plus satisfaisantes au cours de la période. Son produit intérieur brut (PIB) par habitant converge vers celui de la France hexagonale ; le taux de couverture des importations par les exportations avoisine les 50%, alors qu’il est inférieur à 10% dans l’ensemble des autres géographies d’Outre-mer. Enfin, la dépendance financière à l’égard de l’Hexagone tend à se réduire : les versements publics nets représentaient, d’après les dernières estimations publiées avant la pandémie de Coronavirus, 13% du PIB calédonien contre 20% il y a 10 ans.

Dans le Pacifique, la Nouvelle-Calédonie est le seul territoire présentant des indicateurs économiques et sociaux qui se rapprochent de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande. Cependant, malgré les progrès récents, les seuils de pauvreté restent élevés, notamment en Province nord, dans certains quartiers de Nouméa et aux Iles Loyauté. Corollaire de ces problèmes d’inégalités et de pauvreté, celui de la "cherté du coût de la vie" (34% supérieur à celui de la France hexagonale). Le moteur du développement calédonien a été ces dernières années le niveau très élevé des investissements, publics et surtout privés pour les trois grandes usines métallurgiques du territoire.
 

L’Usine de nickel du Sud


L’économie calédonienne, berceau de l’industrie mondiale du nickel, dispose de trois grandes usines dont les alliages et les poudres sont réputés et particulièrement recherchés. Ce moteur de la croissance calédonienne est particulièrement sensible à l’évolution quotidienne des cours mondiaux du métal fixée par la Bourse des métaux de Londres (LME). L’industrie minière et métallurgique calédonienne est un acteur important de la transition énergétique. Elle respecte les normes sociétales et environnementales fixées par l’OCDE et le gouvernement calédonien. Le nickel, ingrédient de l’acier inoxydable et des batteries électriques, pèse pour 90% des exportations de la Nouvelle-Calédonie et représente plus d’un emploi sur cinq. (Sur l’histoire minière de la Nouvelle-Calédonie, deux livres au point de vue différent font référence : "Nickel, la naissance de l’industrie calédonienne" de l’historien Yann Bencivengo et "Les Récits du nickel en Nouvelle-Calédonie" de l’historien martiniquais Eddy Banaré. Dans la longue et passionnante épopée du nickel, "Mystère Dang" est le récit biographique que les journalistes Anne Pitoiset et Claudine Wéry ont consacré au destin atypique et fascinant du stratège nickel, négociateur des indépendantistes calédoniens, André Dang

En Nouvelle-Calédonie, saisir le passé de la mine renvoie d’abord à une expérience quotidienne des paysages (…) L’usine de la SLN à Nouméa, les montagnes ravinées, la côte-est de l’île, où l’on peut voir les sites miniers abandonnés de Houaïlou, et le nord qui se métamorphose avec l’usine du Koniambo.
- Eddy Banaré, "Les Récits du Nickel en Nouvelle-Calédonie" (éditions Honoré Champion)

 

2021 : le nickel au plus haut mais une production insuffisante

L'année 2021 restera comme l'une des pires pour l'industrie calédonienne du nickel, tandis que les cours du métal sont au plus haut à la Bourse des métaux de Londres. La production métallurgique du territoire a baissé de plus de 30 % sur les 6 premiers mois de l'année. Violences contre le site industriel de l'usine du Sud au moment du départ du Brésilien Vale, blocage des sites miniers de la SLN, arrêt de l'usine du Nord à la technologie déficiente, météo pluvieuse : le "métal du diable", comme on surnomme le nickel s'est joué de la production calédonienne.

Mais en cette fin d'année 2021, l'Usine du Sud (Prony Resources) repart de l'avant, sa production est en hausse, commercialisée par le négociant Suisse Trafigura avec la promesse d'un contrat avec Tesla pour les batteries des véhicules électriques. La SLN produira moins que prévu mais sa production est rentable, l'usine du Nord s'efforce de résoudre ses problèmes, elle peut encore compter sur la présence de l'autre géant Suisse du négoce, Glencore.

Toute l'actualité du nickel c'est ici

 

En ce qui concerne l’investissement dans les infrastructures, la tendance est au maintien d’un niveau élevé, soutenu par une politique en faveur de l’habitat et par des projets de construction et d’équipement qui soutiennent le fragile secteur du BTP. L’économie calédonienne profite également d’un secteur bancaire qui affiche une croissance importante, en partie compensée toutefois par le ralentissement attendu des encours hors place des collectivités territoriales. Le tourisme, après plusieurs années de croissance, et malgré la crise du coronavirus, affiche sa volonté d’inscrire le développement durable au cœur de ses priorités. Après l’élevage traditionnel, la Nouvelle-Calédonie dispose avec la filière crevette bleue d’un produit original qu’elle a réussi au fil des années à positionner localement comme un produit du quotidien et à l’exportation sur le segment des produits de luxe, rapporte une récente étude de l’Institut d’émission d’Outre-mer de Nouvelle-Calédonie. Le poids de la filière dans l’économie reste très modeste (environ 0,1 % du PIB) mais plus significatif en termes d’emplois (0,5 % des emplois du secteur privé) : 1500 tonnes de crevettes sont produites chaque année.
 

Politique et cadre institutionnel

Les institutions de la Nouvelle-Calédonie sont le fruit d’un long cheminement. L’organisation actuelle des institutions et l’équilibre des pouvoirs qui en découlent sont nés de deux actes fondateurs : les accords de Matignon-Oudinot, signés en 1988, et l’accord de Nouméa, en 1998. Le premier a mis fin aux violences civiles et a donné naissance aux Provinces, reconnaissance de la pluralité des légitimités. Le deuxième a instauré le gouvernement collégial et le Sénat coutumier, engageant résolument la Nouvelle-Calédonie sur la voie du "destin commun" et de la citoyenneté calédonienne. Les accords de Bercy, signés le 1er février 1998, constituent le préalable économique, métallurgique et minier de l’accord de Nouméa. Le texte a régi les conditions et le processus d’échange des massifs miniers de Poum et de Koniambo. Il a permis la construction de la grande usine de traitement de Koniambo Nickel (KNS) en Province Nord.

Le transfert progressif des compétences de l’État vers la Nouvelle-Calédonie, commencé il y a 25 ans, est sur le point de s’achever. Le gouvernement pluraliste calédonien est une forme de gouvernance spécifique, unique au monde. Il est constitué à la représentation proportionnelle des groupes politiques élus au Congrès. L’assemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie est formée par la réunion d’une partie des élus des trois assemblées provinciales. Il compte 54 membres. Il partage l’initiative des textes avec le gouvernement qu’il élit et contrôle. Le Congrès vote les délibérations et les lois du pays concernant les affaires communes.
 

Vue de la ville de Nouméa


La Nouvelle-Calédonie est organisée en trois Provinces (Nord, Sud et Îles Loyauté), qui disposent d’une compétence de droit commun et s’administrent librement. Les assemblées provinciales sont élues pour cinq ans au suffrage universel direct. Comme toutes les collectivités décentralisées, elles disposent de deux organes d’expression : une assemblée délibérante élue et un exécutif représenté par le président de l’assemblée. Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie verse aux Provinces une dotation de fonctionnement et d’équipement. Chaque année, l’État verse aux Provinces une dotation de fonctionnement et une dotation globale de construction et d’équipement des collèges.

Les Accords de Matignon ont également créé un conseil consultatif coutumier, devenu "Sénat coutumier" avec l’accord de Nouméa. Le Sénat coutumier est composé de 16 membres issus des huit aires coutumières de la Nouvelle-Calédonie (deux représentants par aire). Ses membres ne sont pas élus, mais désignés par les conseils coutumiers des aires, selon les usages reconnus par la coutume. Le Sénat coutumier émet des avis consultatifs sur les projets et propositions de loi du pays relatifs aux signes identitaires de la Nouvelle-Calédonie. Il est obligatoirement consulté sur les projets ou propositions de délibérations intéressant l’identité kanak. Le territoire compte deux députés et deux sénateurs qui représentent la Nouvelle-Calédonie au Parlement français. Enfin, le Conseil économique, social et environnemental de la Nouvelle-Calédonie composé de 41 membres est la quatrième institution de la collectivité, après le Congrès, le gouvernement et le Sénat coutumier.

Société

Si la Nouvelle-Calédonie est surnommée le Caillou en raison de ses ressources en nickel, les indépendantistes emploient aussi le terme Kanaky, qui signifie la terre des Kanaks. Les "événements", pour reprendre la formule consacrée, se sont déroulés à partir de 1984, il y a maintenant plus de 36 ans. Les Français ont alors découvert une île lointaine du Pacifique, un peuple kanak, une communauté "caldoche", mais aussi une histoire jusqu'alors souvent ignorée.
 
En demandant l'indépendance, les Mélanésiens ne se sont pas contentés de dénoncer les inégalités mais ont remis radicalement en cause 150 ans de présence française. Ils ont révélé, pour la première fois, un passé longtemps tu ; passé réinvesti tel un enjeu essentiel de connaissance, de reconnaissance et d'identité. Aux revendications portant sur leur culture, leurs origines et leur monde, s'est ajouté le rappel des injustices subies : les spoliations foncières, les souvenirs de la révolte de 1878 menée par le grand chef Ataï, les rigueurs et les discriminations du code de l'indigénat, la violence des colons, les travaux obligatoires, l’exploitation minière, le fait colonial en général sont les arguments forts d'un discours qui a exigé réparation.

♦ 1981-1984 : escalade de violences politiques en Nouvelle-Calédonie


A travers le "dossier calédonien", ce sont les scènes d'un autre siècle qui reviennent en mémoire : le bagne, la Commune, mais aussi l'épopée coloniale, la découverte du nickel, la conquête, les espoirs et les violences de la colonisation. Nouméa, sa capitale, fut créée en 1854 sous le nom de Port-de-France pour servir de centre administratif, économique et militaire à la présence française. Emergeant dans toute sa complexité, la Nouvelle-Calédonie force le souvenir ; une île qui fut l’une des trois colonies de peuplement française avec le Québec et l’Algérie.

La place à part du nickel et de la SLN
Dans la mémoire collective, elle tient une place importante, un peu comme Renault dans l'Hexagone. La Société Le Nickel (SLN) fondée en 1880 est le berceau mondial de cette industrie. La SLN a longtemps symbolisé la présence française et coloniale. Cette époque est révolue. Elle accueille, au sein de son conseil d’administration, les trois provinces calédoniennes qui ont choisi, en 2007, d'augmenter leur actionnariat en le faisant passer de 30 à 34%. La Nouvelle-Calédonie, par l'intermédiaire de ses représentants, participe directement aux décisions majeures de l'entreprise, avec une attention permanente au rééquilibrage nord-sud du Territoire. Premier employeur privé de l’archipel avec 2300 salariés (dont 97% sont Calédoniens), auxquels s’ajoutent des milliers d'emplois induits ou indirects, la SLN dispose de cinq centres miniers et de l’usine métallurgique de Doniambo. L’actuel président de son conseil d’administration, Dominique Katrawa, est le premier Calédonien nommé à cette fonction.
 

Une mine de la SLN (ERAMET) en Nouvelle-Calédonie.

Culture et sport

Dans la culture mélanésienne et kanak, le clan, la communauté, est plus important que l’individu. L’organisation coutumière traditionnelle continue de régir la vie quotidienne, surtout dans les îles Loyauté, mais également sur l'île des Pins et le long de la côte est de la Grande Terre. Le respect de règles séculaires, qui régissent la vie communautaire et permettent son harmonie, est centre de la communauté humaine. Les clans sont issus d’une terre et font du sol calédonien une succession de lieux chargés de significations mythiques. La coutume constitue le fondement du lien social mélanésien, comme dans les autres sociétés océaniennes.

L’expression culturelle prend des formes multiples, mais la sculpture du bois est probablement l’une des plus symboliques. La sculpture contemporaine reste empreinte des croyances de la société traditionnelle, mais s’inspire aussi des réalités de la société actuelle. Situé Nouméa, le Centre culturel Tjibaou est le lieu emblématique de la culture kanak et de son âme vivante. Dessiné par l’architecte italien Renzo Piano et inauguré en 1989, il vise à valoriser le patrimoine archéologique, ethnologique et linguistique et encourager les formes contemporaines de l’expression kanak. En mai 2020, l’ancien directeur de ce centre, le Calédonien Emmanuel Kasarhérou, a été nommé à la tête du prestigieux Musée du Quai Branly à Paris.
  

Le Centre culturel Jean-Marie Tjibaou à Nouméa


En ville, se trouve aussi le musée de la ville de Nouméa, le musée de l'histoire maritime et le musée de la Seconde Guerre mondiale. Deux théâtres : le Théâtre de l'île et le Théâtre de poche. Les centres culturels de Hienghène et de Koné sont les principaux supports de la programmation culturelle en Province Nord. Par ailleurs, qu’ils soient Calédoniens d’origine européenne, kanak ou métis, les "Broussards" se sont forgés leur propre culture au fil du temps. Ainsi, les BD humoristiques de Bernard Berger, dont "La brousse en folie", est un excellent condensé de "culture broussarde".

Le territoire compte de nombreux écrivains dont les plus célèbres restent Jean Mariotti et Georges Baudoux qui ont offert une description de l’île et de ses paysages. Ils sont également à l’origine d’une écriture romancée du monde minier néo-calédonien. L'écrivaine Déwé Gorodey, auteure de nouvelles et de poésie, est l'une des figures emblématiques de la littérature kanak. Elle est aussi l'une des fondatrices du Parti de libération kanak (Palika). Le poète Nicolas Kurtovitch, aux écrits engagés, est un auteur important sur le Caillou. On lira aussi les "Conversations calédoniennes : rencontre avec Jacques Lafleur," un regard sur l’histoire par le journaliste et essayiste Walles Kotra qui a également publié un ouvrage d’entretiens, "De cœur à cœur" avec Nidoïsh Naisseline, aujourd'hui décédé, fondateur du mouvement indépendantiste kanak. 

La Nouvelle-Calédonie ressemble à un immense terrain de sport. On y pratique l’équitation, les randonnées, le canoë-kayak, le cricket, la planche à voile, le surf, et bien sûr la plongée sous-marine ou encore le tir à l’arc. Sans oublier l’engouement pour le cyclisme, la boxe et l’athlétisme. La Calédonienne Nadia Bernard-Prasad a remporté le marathon de Los Angeles en 1993. Deux enfants du pays ont fait de grandes carrières nationales et internationales dans le football, autre sport populaire sur le Caillou : Christian Karembeu, originaire de Lifou et Antoine Kombouaré, né à Nouméa. Enfin, la Nouvelle-Calédonie compte des athlètes de haut niveau en handisport. On citera notamment Rose Wélépa, trois fois médaillée de bronze aux championnats d’Europe de lancer de poids et de javelot (malvoyants), championne des Jeux du Pacifique en 2015, ainsi que Pierre Fairbank, champion Olympique en 2000 à Sydney sur 200m et deux fois champion du monde en individuel (200 et 800m).

Et maintenant ?

L'organisation du 3ème référendum menacée par le Covid-19 ?

En raison de la circulation du virus en Nouvelle-Calédonie, il est légitime de s’interroger sur la tenue du 3ème référendum sur l'autodétermination du 12 décembre.

"Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ?" Oui ou Non, les deux bulletins possibles dans un bureau de vote à Nouméa le 4 novembre 2018

"Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ?" Oui ou Non, les deux bulletins possibles dans un bureau de vote à Nouméa le 4 novembre 2018

Longtemps épargnée par le Covid-19, la Nouvelle-Calédonie a été frappée de plein fouet avant de voir la situation commencer à s’améliorer. Depuis le lundi 11 octobre, le passe sanitaire devient obligatoire dans certains lieux. Des mesures de protection contre le Covid-19 sont toujours appliquées, comme un couvre-feu.

Les Calédoniens peuvent donc retrouver un semblant de liberté, avec des nouvelles mesures instaurées.

Plus largement, c'est la vie politique sur le territoire qui est affectée. C'est dans ce contexte de crise sanitaire que s'inscrit le troisième et dernier référendum sur l'autodétermination, prévu pour le 12 décembre. L'enjeu est de taille : ce vote doit mettre fin au processus de décolonisation progressif entamé il y a trente ans pour aboutir à une période de transition jusqu'à un référendum de projet en juin 2023. 

Les indépendantistes pour un report

Le variant Delta est venu perturber le jeu. La campagne sur le référendum s'est interrompue le 6 septembre après la découverte de trois premiers cas locaux de Covid-19, avant la flambée causée par ce variant hautement contagieux et la saturation sous tension du centre hospitalier territorial.

Se pose ainsi cette question : est-il raisonnable d'organiser le vote dans ces conditions ? L’évolution reste imprévisible et certains appellent à jouer la carte de la prudence, alors que le virus pourrait perturber le bon déroulement du scrutin. Le contexte sanitaire pourrait en effet décourager certains d'aller voter. 

Ces arguments sont mis en avant par les indépendantistes du FLNKS, qui ont l'intention de demander le report du référendum à Sébastien Lecornu, ministre des Outre-mer, qui est arrivé le 4 octobre à Nouméa pour une visite de deux semaines. "Les gens ont peur de sortir, de circuler. Il n'y a pas la sérénité nécessaire pour organiser une élection comme celle-là. Il vaut mieux renvoyer à une période plus propice", a déclaré à l'AFP Victor Tutugoro, élu de l'UNI-FLNKS (Union nationale pour l'indépendance) et signataire de l'accord de Nouméa.

Les loyalistes pour le maintien

Malgré les craintes sur la situation sanitaire, les acteurs politiques partisans du maintien de la Calédonie dans la République appellent à ne pas reporter le référendum. C'est le message du regroupement "Les voix du non", coalition loyaliste créée pour la campagne. Ce serait "une catastrophe au niveau économique. Il est important de sortir de cette incertitude institutionnelle", a déclaré à l'AFP, Christopher Gygès, directeur de la campagne.

Il estime qu'avec "une sortie de crise en novembre", il restera "un mois de campagne", ce qui est suffisant pour communiquer sur des éléments qui sont les mêmes depuis 2018". Selon lui, les électeurs "sont parfaitement informés", après la diffusion en juin par l'Etat d'un document sur les conséquences du oui et du non.