Le chef guadeloupéen Jérôme Bertin ne déroge pas à la tradition des volailles pour les fêtes. Il vous propose la recette de sa ballottine farcie aux champignons en croûte de pain d'épices, servie avec une réduction d'hibiscus pour la touche caribéenne.
Dans la vie comme derrière les fourneaux, le chef Jérôme aime honorer les origines guadeloupéennes de son père et celles, hexagonales, de sa mère. A la tête de Kréyol Fusion, il transmet dans sa cuisine son métissage et ses multiples influences, comme pour le repas de fêtes qu'il a choisi de nous présenter.
Au menu, une ballottine de volaille farcie aux champignons, en croûte de pain d'épices, accompagnée d'une réduction à base de grosey-péyi (groseille-pays), plus communément appelée hibiscus. "L'hibiscus et le sirop d'hibiscus sont très utilisés à Noël aux Antilles", nous explique le chef qui réalise son sirop d'hibiscus grâce aux "colis pays" envoyés chaque année depuis la Guadeloupe.
Du "feeling", pas de complications
Le long intitulé du plat pourrait faire peur, mais il s'agit en fait d'un plat très simple à réaliser, tient à rassurer Jérôme Bertin : "La cuisine, c'est au feeling. Il ne faut pas faire peur aux gens en donnant des quantités très précises, tant de grammes, etc. C'est une cuisine d'assemblage."
Une cuisine de "voyage", également, "depuis le canapé vers la Martinique et la Guadeloupe", ajoute-t-il dans un rire.
Alors, comment procéder ? Premièrement, les ballottines. "Il faut six tranches fines d'escalope de dinde, bien tapées pour les attendrir", explique le chef. Ensuite, pour la farce, de la chair à saucsisse, du piment végétarien, de la cive et bien sûr, les champignons (cèpes, pleurottes, champignons de Paris... le choix est libre).
- Déposer les escalopes bien fines sur une feuille de papier film.
- Hâcher finement les champignons, le piment végétarien et la cive, puis les faire revenir à la poêle avec sel, poivre et huile d'olive.
- Mélanger le tout à la chair à saucisse, puis déposer la farce au creux des escalopes. Bien les rouler à l'aide du film alimentaire pour réaliser des boudins.
- Les faire revenir 30 mn à feu doux à la poêle puis les laisser refroidir. (Astuce du chef : "les mettre dans un saladier avec des glaçons et de l'eau")
Dès qu'elles sont froides, il faut réaliser la croûte de pain d'épices des ballottines. "Il faut mettre le pain d'épices au four pendant 15-20 mn à 180°C, puis le sortir et le mixer avec de la chapelure", explique le chef. Pour les quantités, c'est du "tant pour tant" : 200 g de pain d'épices pour 200 g de chapelure, par exemple. Pour la croûte, voici le pas à pas :
- Sortir les ballottines et bien les sécher.
- Tremper les ballottines dans du jaune d'œufs, puis dans le mélange pain d'épices et chapelure.
- Faire cuire "tout doucement" les ballottines dans une poêle avec de l'huile "jusqu'à ce qu'elles soient bien dorées".
Il ne reste plus maintenant qu'à réaliser la réduction avec du sirop d'hibiscus et du fond de volaille, fait maison "si on est courageux", ou déshydraté si on est pressé. "C'est assez simple", assure Jérôme Bertin. "On rajoute de l'eau et du sirop dans le fond de volaille et on laisse réduire sur le feu jusqu'à obtenir une sauce nappante". Et voilà ! "On n'est pas dépaysés avec cette recette et elle fait un peu partie de moi et de mes deux cultures", raconte Jérôme Bertin qui n'a découvert la Guadeloupe que sur le tard.
Transmission
Dans son livre sorti en novembre dernier, Goût d'Antilles (avec Aline Princet, éd. Mango), il partage cette cuisine métissée, inspirée de la France hexagonale où il a grandi, mais aussi de la Caraïbe dont il met un "point d'honneur" à raconter l'histoire et la culture, "que ce soit celle du commerce triangulaire ou des Arawaks, les premiers habitants de la Caraïbe".
La culture passe par le goût, par la cuisine. On ne m'a pas transmis cette culture, je suis allé la chercher. Aujourd'hui je veux la transmettre à mes enfants. J'essaye de le faire car c'est très important pour construire son identité.
Voir le reportage de Nathalie Sarfati, Denis Rousseau-Kaplan et Daniel Quellier :
Une histoire racontée dans ses recettes avec ces ingrédients patrimoniaux, qu'il s'agisse de l'hibiscus ou du manioc, que l'on retrouve dans sa bûche manioc, chocolat blanc et citron vert. "Le manioc, comme le fruit à pains, c'est ce qu'on donnait aux esclaves, ce qu'ils avaient ramené d'Afrique pour se nourrir quand ils sont arrivés sur nos terres avec le commerce triangulaire", raconte Jérôme Bertin. "Tout en gardant l'authencitié, aujourd'hui on transmet et on innove, toujours avec le rappel à notre culture qui est important. On n'a pas oublié."
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