Restitutions des restes humains : les députés remettent à plus tard la question des restes ultramarins

Des milliers de restes humains sont conservés au musée de l'Homme, à Paris.
La proposition de loi qui vient d'être adoptée par l'Assemblée entend simplifier les demandes de restitutions, à condition qu'elles émanent d'un État. Députés et sénateurs doivent désormais tenter d'élaborer une version définitive du texte en commission mixte paritaire.

Des crânes, des squelettes, des cheveux… Alors que des dizaines de milliers de restes humains s’entassent dans les réserves des musées français, les députés ont voté une proposition de loi pour faciliter leurs restitutions. Pour l’instant, chaque restitution nécessite le vote d'un texte de loi spécifique. À ce jour, seuls deux textes de ce type ont été votés : le premier en 2002, pour rendre la dépouille de Saartjie Baartmanl, dite "Vénus hottentote", à l’Afrique du Sud, le second en 2010, restituant des têtes maories à la Nouvelle-Zélande.

L’esprit de la proposition de loi, qui a déjà été votée au Sénat en juin dernier, est de créer un cadre général pour lister des critères objectifs de restitution et sortir du cas par cas. Le texte a été adopté avec 97 voix à l'Assemblée nationale. Sur les 126 députés présents au moment du vote, 29 se sont abstenus et aucun n’a voté contre. Les députés et les sénateurs doivent désormais se réunir en commission mixte paritaire pour tenter d'élaborer une version définitive de la proposition de loi. 

Un autre cadre pour les restes ultramarins

En limitant les restitutions aux demandes faites par "des États", le texte exclut toute demande venant des Outre-mer. Si Mereana Reid Arbelot, députée de Polynésie française, a bien tenté d’inclure les territoires ultramarins via un amendement, ce dernier n’a pas été retenu. "On ne veut pas laisser ce sujet en l’air, on veut y travailler, a affirmé la ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, devant la commission des Affaires culturelles de l’Assemblée nationale la semaine dernière. Ce sujet des restes ultramarins nécessite un travail complémentaire, pour identifier le bon système pour ces cas particuliers." 

Il faut qu’on trouve une solution adaptée. Là, on n’est pas dans un cadre de relations internationales, c’est la France avec elle-même.

Rima Abdul Malak, ministre de la Culture

"J’ai bien fait comprendre que la proposition de loi actuelle ne nous convenait pas. Nous sommes dans notre droit de demander à ce que nos anciens reviennent au pays après 140 ans", estime Corinne Toka Devilliers, qui se bat pour le retour des restes, conservés au musée de l'Homme à Paris, d'amérindiens Kali'na de Guyane exhibés au Jardin d'acclimatation à la fin du XIXe siècle et morts sur place. "Je suis sensible à la demande des descendants de ces Guyanais qui ont été honteusement exhibés dans un de ces zoos humains", a assuré la ministre de la Culture, précisant que son cabinet avait "engagé un dialogue" avec l’association Moliko Alet+po, une structure créée par Corinne Toka Devilliers. 

Si la proposition de loi votée par les députés ne crée pas de cadre pour les Outre-mer, elle entend toutefois en dessiner un prochainement. Le deuxième article du texte prévoit que le gouvernement remette au Parlement un rapport "dans un délai d’un an" après la promulgation de la loi pour, à terme, élaborer "une procédure pérenne de restitution des restes humains" ultramarins.