La nouvelle pièce de la metteuse en scène guyanaise est résolument tournée vers les femmes, vers la figure de la Femme. Avec Laudes des femmes des terres brûlées, Odile Pedro Leal adresse dans un élan de quasi-communion œcuménique (même si les laudes du titre évoquent des louanges, des prières chrétiennes formulées au lever du soleil) remonte aux sources, au rites et aux traditions et évoque, dans L’Oreille est hardie, les combats et les défis que les femmes doivent relever :
Lever de rideau pour "Laudes…"
Nous l’avions rencontrée il y a trois ans pour son spectacle précédent : Bernarda Alba de Yana adaptée de la célèbre pièce de Federico Garcia Lorca. Et c’est au lendemain des premières représentations de Laudes des femmes des terres brûlées, sa nouvelle création que L’Oreille… retrouve Odile Pedro Leal, encore toute fébrile mais quelque peu rassurée par les premiers retours du public.
Et c’est en Martinique, au théâtre Aime Césaire à Fort de France que ça s’est passé. C’est d’ailleurs la première fois en 28 ans de carrière que l’un de ses spectacles n’est pas montré d’abord en Guyane. Un concours de circonstance a fait que cela n’a pas été possible mais Odile Pedro Leal n’a pas perdu au change. Symboliquement, commencer la vie de Laudes… dans le théâtre voulu par le poète martiniquais, est loin de lui déplaire.
Du théâtre exigeant…
D’ailleurs, l’écrin ainsi fourni colle bien avec l’idée d’un certain théâtre qu’elle a voulu retrouver avec Laudes des femmes des terres brûlées. Si la deuxième pièce écrite par Odile Pedro Leal s’appuie sur quelques poèmes signés de l’autrice d’origine haïtienne Marie-Célie Agnant, l’ensemble du texte a été voulu, conçu, pensé par la Guyanaise qui s’est donné là l’occasion de mêler tous ses désirs de théâtre.
…et du théâtre engagé
Un texte riche, dense, comme un long poème, comme une prière rituelle empli de constat amer sur le sort des femmes mais porteur aussi d’espoir. L’ensemble est porté sur scène par quatre comédiennes et un comédien, accompagnés parfois de quelques chants et de sons de flûtes amérindiennes qui pointent le bout de leur bec.
Les mots disent, racontent à travers le temps et l’espace, ces femmes des quatre coins du monde, toutes à la fois singulières et universelles.
Repères et Mère
Les quatre personnages que l’on découvre en ouverture de la pièce se retrouvent après ce qui semble être des années de séparation. Elles sont perdues et ont ensemble un objectif : retrouver la Mère qui les a abandonnées…
Ces quatre femmes, quatre sœurs aux personnalités différentes, représentent chacune une facette de la féminité. Chacune d’entre elles est issue d’un point cardinal différent et raconte la traversée de siècles par les femmes, à travers le monde.
Paroles de femmes
Odile Pedro Leal use ainsi - notamment via les monologues - d’une forme d’allégorie poétique mais aussi politique, pour ce que le spectateur pourrait entendre comme un manifeste mais sûrement plus encore une ode à la femme, aux femmes.
Avec en particulier, la dernière prise de parole de celle qui représente la femme Amérindienne et l’évocation de la dissolution de tout un peuple.
Écoutez L’Oreille est hardie…
Et découvrez Laudes des femmes des terres brûlées, pièce à la fois âpre et poétique, lyrique et politique par moments, qui interpelle indéniablement. Les cinq comédiens sont à l’avenant apportant chacun.e d’indéniables caractéristiques de composition. La mise en scène est à la fois dépouillée et fluide, jouant notamment très habilement des lumières tantôt denses, tantôt douces, tantôt absentes, pour mieux faire entendre le texte ciselé d’Odile Pedro Leal.
Un spectacle qui devrait prendre encore du corps avec le temps : il faut espérer avec sa créatrice qu’il poursuive son voyage dans nos Outre-mer, dans l’Hexagone et ailleurs, au cours des prochains mois…
Retrouvez la metteuse en scène Odile Pedro Leal dans L’Oreille est hardie, c’est par ICI !
Ou par lĂ :
"Laudes des femmes des terres brûlées" s’est jouée les 07, 08, 09 mars en Martinique, le 12 mars en Guadeloupe. Tournée en cours d’élaboration.