Battue lors des élections sénatoriales du 24 septembre, la secrétaire d'État à la Citoyenneté Sonia Backès a présenté sa démission. La Calédonienne, figure de premier plan du camp non indépendantiste en Nouvelle-Calédonie, était la seule membre du gouvernement à briguer un siège de sénatrice. Son omniprésence politique (membre du gouvernement, présidente de la province Sud, représentante des non indépendantistes aux discussions sur l'avenir de la Calédonie) lui promettait une élection facile.
Et pourtant, la division de son camp a mené à l'élection inédite d'un sénateur indépendantiste, Robert Xowie, qui fera son entrée au Sénat aux côtés du dissident Les Républicains, Georges Naturel. "Nous allons découvrir dans les prochaines semaines le prix de la trahison pour le camp non indépendantiste", avait réagi la secrétaire d'État après les résultats dimanche, visiblement amère.
C'est lors d'un entretien avec le président de la République, que cette démission a été évoquée. La règle édictée par Emmanuel Macron – qui veut que tout membre du gouvernement se présentant à une élection qui ne serait pas élu devrait démissionner – semble donc également s'appliquer pour les sénatoriales. En juin 2022, trois ministres battus aux législatives avaient dû démissionner, dont la Guadeloupéenne Justine Benin.
Récompensée après son ralliement à Emmanuel Macron lors de la présidentielle de 2022, Sonia Backès, fondatrice du parti Les Républicains calédoniens, avait succédé à Marlène Schiappa à la tête du secrétariat d'État à la Citoyenneté, placé sous tutelle du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer. Cette femme politique de 47 ans est restée une membre très discrète de l'équipe ministérielle d'Elisabeth Borne. Un des seuls sujets sur lesquels elle est parvenue à se distinguer en un an : la lutte contre le sectarisme, un sujet hautement personnel.
Les "semi-vérités" d'une rescapée du sectarisme
Mais avant ses actions gouvernementales, la première fois que Sonia Backès fait parler d'elle dans les médias, en septembre 2022, c'est lorsqu'elle nomme Brieuc Frogier au sein de son cabinet. L'homme, fervent opposant à l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie, avait soutenu Eric Zemmour lors de l'élection présidentielle. Franceinfo révèle alors la nomination, qui fait scandale. Il démissionne dans la foulée.
Sonia Backès accorde quelques jours après ce soubresaut médiatique un long entretien au Figaro, racontant ses deux combats : celui pour une Calédonie française, et celui contre les sectes. À l'occasion de l'ouverture des assises contre les dérives sectaires au mois de mars, la Nouméenne réitère et détaille son histoire personnelle – ou plutôt celle de sa mère, adepte de la Scientologie – dans les colonnes du Parisien. Elle espère que son récit servira sa mission gouvernementale. Avant la défaite aux sénatoriales, la secrétaire d'État préparait un grand plan national pour s'attaquer au sectarisme, qui devrait faire l'objet d'un projet de loi. Mais ce ne sera désormais plus elle qui défendra le texte.
Discrète au sein de l'exécutif, Sonia Backès n'en attire pas moins l'attention des médias. Un mois après son interview au Parisien, le magazine Le Monde pointe les "semi-vérités" de la secrétaire d'État sur ses relations avec sa mère, rapportant les accusations d'un demi-frère qui estime qu'elle n'a jamais coupé les ponts avec celle-ci et publiant un SMS échangé avec elle après sa nomination au gouvernement. La Calédonienne se défend de tout mensonge et nuance quelque peu son récit.
Le malaise des indépendantistes
La présence de la Calédonienne au sein du gouvernement n'a pas ravi tout le monde. Chez elle, en Calédonie, elle a même gêné. Car la présidente de la province Sud a été nommée au moment où le territoire commençait la période post-Accord de Nouméa pour redéfinir ses relations avec l'État. Or, les indépendantistes ont vu d'un mauvais œil sa double casquette de membre du gouvernement et de représentante du camp non indépendantiste.
Est-ce que la nomination de Madame Backès comme secrétaire d'État n'ajoute pas de flou dans le message ?
Daniel Goa, président de l'Union calédonienne
"Elle est présidente de la province Sud, présidente du groupe politique qu'elle représente [Les Républicains calédoniens, NDLR] et ensuite, elle est secrétaire d'État", soulignait alors Daniel Goa, chef de l'Union calédonienne, une des composantes du FLNKS, pointant du doigt le conflit d'intérêts induit par la situation. Autre problème : son secrétariat d'État placé sous la tutelle du ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, lui-même activement impliqué dans le dossier calédonien.
Sa nomination n'a pourtant pas entravé les discussions sur l'avenir institutionnel du territoire. Depuis le troisième référendum de 2021, les indépendantistes du FLNKS ont accepté de renouer le dialogue avec le gouvernement. Des rencontres entre les trois parties ont même eu lieu lors des dernières discussions à Paris, début septembre. Sortie de l'équipe ministérielle, Sonia Backès pourra maintenant se consacrer pleinement à son poste de présidente de la province Sud ainsi qu'aux discussions sur le futur du territoire calédonien au sein du camp des non-indépendantistes. Sans ambiguïté, cette fois-ci.