C'est la première fois qu'un élu indépendantiste kanak s'exprime au Parlement français. Mercredi 11 octobre, lors des questions au gouvernement, Robert Xowie, fraîchement élu au Sénat le 24 septembre, a interrogé le gouvernement sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, fustigeant le projet d'accord présenté par Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, comme base de négociations entre l'État, les indépendantistes et les anti-indépendantistes.
"Que dit ce document ? D'abord, il abandonne toute trajectoire de décolonisation, a protesté le sénateur. Il vise ensuite à se substituer à l'accord de Nouméa, en lui faisant perdre sa valeur constitutionnelle. Il veut enfin ouvrir le périmètre du peuple calédonien aux arrivants ayant 10 ans de résidence." Pour les indépendantistes, cette première mouture, censée orienter les discussions, fait trop de concessions au camp anti-indépendantiste.
Alors que l'exécutif veut accélérer les négociations pour parvenir à un accord tripartite, l'Union calédonienne (UC), une composante indépendantiste du FLNKS, a annoncé boycotter les bilatérales (avec l'État) et trilatérales (avec les non-indépendantistes) au moins jusqu'au mois de novembre. Le parti doit se réunir en congrès du 9 au 12 novembre à Kwenyii, et décidera alors s'il retourne autour de la table des négociations.
"Le gouvernement compte-t-il passer en force ?"
Robert Xowie, membre de l'UC, a ainsi interrogé le gouvernement sur la posture qu'il adopterait si aucun accord n'était trouvé avec l'ensemble des parties : "Sans consensus, le gouvernement compte-t-il (...) passer en force [la] révision constitutionnelle (...) ?".
En réponse, la Première ministre Élisabeth Borne a assuré que l'objectif du gouvernement restait d'obtenir un accord entre les indépendantistes et les non-indépendantistes. "Au cours des derniers mois, le président de la République et le gouvernement se sont employés à créer les conditions d'un dialogue serein et constructif avec les indépendantistes et les non-indépendantistes", a-t-elle défendu, alors que le sénateur kanak a regretté "le manque d'impartialité" de l'État dans ces discussions.
La cheffe du gouvernement, qui a reçu avec Gérald Darmanin l'ensemble des délégations calédoniennes à Paris au début du mois de septembre, a critiqué sans la nommer l'attitude de l'Union calédonienne. "Le gouvernement souhaite parvenir à un accord d'ici la fin de l'année, a-t-elle martelé. Ceci suppose néanmoins que tous participent aux discussions, animés par la volonté d'aboutir."
Au terme des échanges [du mois de septembre à Paris], tous, non-indépendantistes comme indépendantistes, se sont engagés à poursuivre les discussions sur la base d'un projet d'accord que le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin vient de transmettre aux partis. Ce document est une base de travail. Il appartient aux partis de formuler leurs propositions concrètes.
Elisabeth Borne, Première ministre, au Sénat
Malgré le retrait de l'UC, le gouvernement compte bien suivre son calendrier pour permettre l'organisation des élections provinciales au cours de l'année 2024 avec un corps électoral modifié. Gérald Darmanin se rendra en Nouvelle-Calédonie à la fin du mois d'octobre pour poursuivre les discussions.
"Le moment venu, le gouvernement présentera un projet de révision constitutionnelle pour tirer les conséquences de l'accord trouvé, a ajouté la Première ministre. (...) Le projet d'accord sera soumis à l'approbation de la population calédonienne. Et une fois l'accord entré en vigueur, les élections provinciales seront organisées."