Élections régionales et territoriales : quels enjeux en Outre-mer pour le second tour ?

Les électeurs de La Réunion, Guyane, Guadeloupe et Martinique retournent aux urnes dimanche 27 juin pour le 2nd tour des élections régionales et territoriales. Après les discussions de l'entre-deux-tours, quels sont les forces en présence et les enjeux ? Outre-mer la 1ère fait le point.

Divisée dimanche dernier, à La Réunion, comme en Guyane, la gauche a profité de l'entre-deux-tours pour se rassembler. Des listes d'union pour tenter de battre les deux présidents sortants : Didier Robert et Rodolphe Alexandre, larges vainqueurs du premier tour. À l'inverse, en Guadeloupe, il n'y a eu ni alliance ni fusion d'une gauche pourtant largement devancée à l'issue du premier tour. Pas de fusion non plus en Martinique où pas moins de quatre listes se maintiennent au second tour. 

Avec 31% en Guadeloupe, 32% en Martinique, 34% en Guyane et 37% à la Réunion, la participation pourrait bien être l'arbitre de ce second tour et faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre dans plusieurs territoires. 

Rappelons que ce 27 juin, à La Réunion et en Guadeloupe, les électeurs votent pour deux scrutins : les régionales et les départementales. Les électeurs de Martinique et de Guyane désignent, eux, les membres de leurs assemblées territoriales dotées des compétences d’un conseil régional et d’un conseil départemental. 

► À La Réunion, bis repetita pour Didier Robert et Huguette Bello

Sortis en tête du premier tour des élections régionales, Didier Robert et Huguette Bello s’affrontent de nouveau dimanche pour décrocher le fauteuil de président de la Région. Fort de 31,1% des voix exprimées au terme du premier tour, le sortant, Didier Robert, rêve d'un troisième mandat. La maire de la commune de Saint-Paul a, quant à elle, obtenu le ralliement de la gauche réunionnaise derrière elle.

Lors des élections régionales de 2015, à l’issue du second tour à La Réunion, la liste Union de la droite conduite par Didier Robert était arrivée en première position avec 52,69% des voix et 29 sièges attribués. Le président (déjà) sortant s’était imposé face à la liste Divers Gauche conduite par Huguette Bello (31%) des voix et 16 sièges attribués. Lors de ce second tour en 2015, la participation à La Réunion était de 55,28%.

Union de la gauche et arithmétique
Ralliée par Ericka Bareigts (18,5%) et Patrick Lebreton (7,8%), Huguette Bello, 70 ans, mène désormais une liste d’union de la gauche. Elle a placé Ericka Bareigts, maire de Saint-Denis arrivée troisième du premier tour, en troisième position sur sa liste, alors que Patrick Lebreton en est le sixième nom. Plus qu'un rassemblement, les candidats se sont engagés sur un projet commun qu'ils ont signé lundi 21 juin à Saint-Denis. Avec cette alliance, la gauche peut espérer reprendre l'avantage dans les urnes.

Mais Didier Robert estime que "les additions ne font pas les élections". Six ans après sa victoire face à Huguette Bello aux Régionales de 2015, il devra convaincre les indécis et les abstentionnistes, s’il veut conserver son fauteuil de président de Région, faute d'alliés pour pouvoir fusionner. Dimanche dernier, l’abstention a battu un nouveau record dans le département de l'océan Indien avec plus de 63%. À peine plus d’un tiers des électeurs se sont déplacés aux urnes. 

► En Guyane, la gauche de Rodolphe Alexandre face à... une union de la gauche

À la tête de la Guyane depuis dix ans (président du Conseil régional puis de l’Assemblée territoriale de Guyane) et candidat à sa propre succession, Rodolphe Alexandre, est sorti en tête du premier tour avec 43,7% des voix, suivi par les listes du député Gabriel Serville (27,7%) et de Jean-Paul Fereira (23,3%). Tous les deux qualifiés pour le second tour, il sont parvenus à trouver un terrain d'entente après d'âpres discussions pour présenter une liste d'union. 

Gabriel Serville a ainsi obtenu le ralliement de Jean-Paul Fereira, mais aussi de Jessi Américain qui était à la tête de la quatrième liste présente au premier tour. Ce dernier place trois candidats sur la nouvelle liste d'union, tous en position éligible. Premier Amérindien à briguer le poste de président de Région et fort d'un bon score au premier tour, Jean-Paul Fereira conserve 23 candidats sur la liste fusionnée. Candidat favori de l'ouest rural de la Guyane, le maire d’Awala-Yalimapo est largement soutenu par un électorat qui a jusqu'ici échappé à Gabriel Serville, plus populaire à Cayenne et dans les villes côtières. 

La participation à l'épreuve du Covid-19
En Guyane comme ailleurs, le taux de participation s'annonce déterminant à l'issue du second tour. Il s'élevait à 34% dimanche dernier. Ces dernières semaines, plusieurs voix se sont élevées, et notamment celles des adversaires directs de Rodolphe Alexandre, pour dénoncer le maintien des élections, alors que la situation sanitaire est difficile dans le territoire français d'Amérique du Sud. Une troisième vague de l'épidémie de coronavirus perdure avec un taux d'incidence moyen autour de 300 cas pour 100 000 habitants la première quinzaine de juin. 


► En Guadeloupe, le président sortant, Ary Chalus, frôle la victoire dès le premier tour

Les Guadeloupéens ont failli ne pas voir de second tour. À la tête d'une liste centriste, Ary Chalus, président sortant de la Région, a rassemblé 49,3% des voix dimanche dernier. Une seule autre liste a dépassé la barre des 10%, qualificative pour le second tour, celle de la présidente du Conseil départemental, Josette Borel Lincertin. La liste nationaliste - mouvement relancé récemment en Guadeloupe - a échoué à 300 voix près (9,4%). 

Les deux listes n'ont pas changé entre les deux tours. Pourtant largement devancée, la socialiste Josette Borel-Lincertin n'a pas souhaité fusionner avec d'autres candidats. À gauche comme elle, Max Mathiasin (5,6%), ancien secrétaire de la fédération guadeloupéenne du parti socialiste – son ancienne famille politique – attend de voir "la suite".

Une abstention sans précédent
La Guadeloupe figure sur le podium des régions les plus abstentionnistes cette année (69%). La palme revient au Grand Est (plus de 70%), suivi des Pays de la Loire. L'île papillon est arrivée en troisième position, ex-aequo avec l’Île-de-France. Jamais une élection régionale n’avait enregistré un tel désintérêt en Guadeloupe.


► En Martinique, quatre listes et un duel nord/sud

La Martinique détenait, dimanche dernier, le record du nombre de listes participant au premier tour en Outre-mer : quatorze, dont plusieurs issues de la société civile. Même record au second tour puisque quatre listes ont franchi la barre des 10% à l'issue du premier tour, toutes ayant choisi de se maintenir. Mais ce sont bien les cadors de la politique qui l'emportent : Serge Letchimy arrivé premier avec 31,7% des voix, Alfred Marie-Jeanne (25,8%), Jean-Philippe Nilor (12%) et Catherine Conconne (10,6%). Il n'y a eu ni alliance, ni fusion dans l'entre-deux-tours, les listes sont identiques à celles présentées au premier tour.

La liste de Serge Letchimy, député et président du Parti progressiste martiniquais, a devancé celle d'Alfred Marie-Jeanne, président de la collectivité territorialesortant et chef du Mouvement indépendantiste à l'issue d'un premier tour où les deux listes ont fait la course en tête. Alfred Marie-Jeanne règne dans le sud, Serge Letchimy dans le nord. Les deux hommes sont au coude à coude dans le centre et Fort-de-France a fait la différence, la ville-capitale faisant pencher la balance en faveur de Serge Letchimy.


► Mayotte vote aussi ce dimanche

Également renouvelé les 20 et 27 juin, le conseil départemental de Mayotte assure là-bas les compétences régionales. 148 candidats étaient en lice au premier tour pour 26 sièges de conseillers départementaux à pourvoir. Au second tour, ce sont onze duels qui vont se tenir, ainsi qu'une triangulaire dans la commune de Tsingoni, au centre-ouest de l'île. 

Malgré la situation sanitaire liée au coronavirus, toujours sous surveillance accrue dans le 101e département, la participation a atteint 64% au terme du premier tour.