La solution pourrait-elle venir de La Réunion ? Alors que les partis de gauche, qui forment le Nouveau Front Populaire (NFP), enchaînent les tractations pour trouver le nom du prochain locataire de Matignon, le journal L'Humanité a eu vent de quelques indiscrétions, vendredi 12 juillet. Selon le quotidien, la présidente du conseil régional de La Réunion, Huguette Bello, pourrait être la future Première ministre d'un gouvernement formé par le NFP. Son nom est en tout cas poussé par les communistes et les insoumis. Outre-mer la 1ère a pu confirmer que la figure historique de la gauche réunionnaise est au cœur des discussions.
Depuis la victoire surprise de la gauche aux élections législatives, le Parti communiste (PCF), la France insoumise (LFI), les Écologistes (EELV) et le Parti socialiste (PS) peinent à se mettre d'accord sur un nom qui sera à même de former un gouvernement de cohabitation avec Emmanuel Macron. Au PS, on ne veut pas d'une personnalité aussi clivante que Jean-Luc Mélenchon à Matignon. De leur côté, les insoumis revendiquent d'être le premier mouvement au sein du Nouveau Front Populaire et estiment légitimes que le prochain Premier ministre soit issu de leurs rangs.
Mais les négociations peinent à aboutir et le NFP n'a toujours pas proposé de nom pour remplacer Gabriel Attal, toujours en place depuis que le président de la République a refusé sa démission, lundi. De l'autre côté de l'échiquier politique, des figures de l'ancienne majorité présidentielle et de la droite républicaine poussent pour former une alliance assez large allant de la gauche à la droite, mais excluant le Rassemblement national et La France insoumise.
Un symbole de la gauche unie ?
Dans ce paysage politique chaotique, Huguette Bello, présidente du parti Pour La Réunion (PLR), a l'avantage d'être extérieure aux rivalités qui agitent la gauche nationale, et pourrait donc faire consensus. Une nécessité pour que la gauche prenne le pouvoir. Membre historique du Parti communiste réunionnais, l'ancienne députée (1997-2020) a quitté le PCR en 2012 pour prendre la tête de son propre mouvement, PLR. En 2021, elle remporte de justesse les élections régionales en parvenant à réunir les forces de gauche derrière son nom.
Mais réunir les gauches à l'échelle nationale sera compliqué pour celle qui est engagée en politique depuis ses 24 ans (elle en a aujourd'hui 73). Bien qu'indépendante de La France insoumise, elle ne cache pas sa proximité avec Jean-Luc Mélenchon. Régulièrement, lors de ses campagnes électorales, le leader de gauche radicale a fait appel à sa camarade réunionnaise, qui n'a jamais hésité à monter sur scène pour faire campagne pour lui. Aux dernières élections européennes, elle faisait même partie de la liste menée par Manon Aubry (la Réunionnaise était en 81ᵉ position, juste derrière... Jean-Luc Mélenchon).
Surtout, pendant les élections législatives surprises annoncées par Emmanuel Macron au soir des européennes, le PLR d'Huguette Bello n'a pas réussi à s'accorder localement avec la gauche tendance sociale-démocrate représentée par Ericka Bareigts, l'actuelle maire de Saint-Denis et ancienne ministre des Outre-mer de François Hollande. Dans certaines circonscriptions de La Réunion, un candidat unique représentait la gauche. Dans d'autres, aucun accord n'avait été trouvé (principalement à cause des ambitions politiques locales de certains, en vue des élections municipales de 2026). Mais, pour le second tour, alors que le Rassemblement national est parvenu à se qualifier dans les sept circonscriptions de l'île (une première), la gauche s'est réunie et est parvenue à faire élire six députés sur sept.
Pour devenir Première ministre, Huguette Bello devra franchir plusieurs étapes. Déjà, elle devra faire consensus au sein même du Nouveau Front Populaire. Le député LFI Antoine Léaument a dores et déjà indiqué qu'elle était "un très bon nom" pour Matignon. Marine Tondelier, la secrétaire nationale des Écologistes, a passé un coup de téléphone à la présidente de la Région Réunion. Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, estime, pour sa part, qu'elle "aurait cette capacité à construire des majorités et parler avec le président de la République". Seuls les socialistes se montreraient plutôt sceptiques à l'idée de propulser Huguette Bello à la tête du gouvernement.
Ensuite, il faudra que la Réunionnaise convainque au-delà de la gauche. Car, le NFP n'a qu'une majorité relative à l'Assemblée nationale. Si les élus de la majorité sortante, de droite et d'extrême droite s'opposent à sa nomination, Huguette Bello pourra, sans avoir eu le temps de s'installer, rendre les clés de Matignon. "C'est Mélenchon avec une perruque, c'est une imposture", lâche-t-on déjà au sein de l'ancienne majorité présidentielle.