Dans la décision de justice, que franceinfo s'est procurée, la juge des référés du tribunal de Mamoudzou, à Mayotte, considère que la destruction des habitations est "manifestement irrégulière" et qu'elle "met en péril la sécurité" des habitants du bidonville. Elle demande donc à la préfecture de mettre en place deux mesures : un relogement adapté pour chaque famille ainsi que la possibilité de stocker leurs biens dans un lieu protégé.
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L'épilogue de plusieurs mois de bataille juridique
En février dernier, le tribunal administratif a donné raison à une vingtaine d'habitants de ce bidonville qui contestaient l'arrêté de destruction de leurs logements, publié le 2 décembre dernier. Le tribunal judiciaire, saisi en urgence lundi, a élargi cette décision à tout le bidonville, près d'une centaine de familles vivant dans des habitats précaires.
"C'est un moment extraordinaire de justice", réagit maître Flor Tercero, représentante d'une des familles. Selon ses explications, les cases en taule étant imbriquées les unes aux autres, la justice a estimé qu'il n'était pas possible d'épargner les habitations des 20 familles en détruisant tous les autres logements attenants. Elle évoque une "victoire pour les habitants" qui "rappelle que même si on habite dans un bidonville, on a des droits et une dignité".
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Appel en cours et relogements à l'étude
Le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, indique sur franceinfo avoir "pris acte de la décision judiciaire". Il a demandé aux avocats de l'État de faire appel de cette décision.
Le préfet estime que "la mise en danger aujourd'hui" ne se trouve pas du côté de "l'opération menée par la préfecture et préparée depuis plusieurs mois" mais dans le fait "de laisser les gens vivre dans des conditions indignes".
Toutefois, Thierry Suquet reconnaît que cette décision judiciaire l'oblige à regarder les propositions de relogement qui ont été faites. Il soutient que sur ce bidonville "plus de 45 familles et 100 personnes ont été relogées", soit "plus de 50 %" des personnes présentes sur place. Le préfet promet d'ailleurs que les services de l'État continueront "à reloger les gens". Il assure que "pour chaque personne, pour chaque famille" qui a "vocation à rester sur le territoire", une proposition de relogement est faite et il entend bien démontrer cela "en appel".
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Un revers pour l'État
La préfecture parle d'un "malentendu" mais pour les opposants à l'opération Wuambushu, lancée pour endiguer la délinquance et l’immigration illégale sur l'île, il s'agit surtout d'un premier revers judiciaire.
Lundi, Thierry Suquet, assurait devant la presse que la France "n'arrêtera pas" cette opération. La préfecture avait donné rendez-vous aux médias à 5h heure de Paris pour assister à la destruction du bidonville Talus 2 qui devait être la première de cette opération d'envergure.
Autre coup dur après la décision des Comores de ne pas laisser accoster sur son port un bateau de migrants comoriens expulsés de Mayotte. Ils ont dû retourner au centre de rétention administrative du 101e département français.