Tchia "se démarque aisément grâce à sa proposition charmante" ; "les images sont à la fois dépaysantes et paradisiaques, ce qui donne un goût d'aventure à ce jeu" ; bien qu’il "s'inspire beaucoup de Zelda : Breath of the Wild", Tchia "possède des arguments qui lui sont propres" ; "peut-être un peu faible sur le plan graphique" mais "le résultat produit est plutôt bluffant" ; "la Nouvelle-Calédonie donne un charme fou à Tchia que ce soit visuellement ou sur le plan musical".
Toutes ces critiques proviennent de la presse spécialisée dans le jeu vidéo qui a pu tester Tchia, avant sa sortie prochaine, dont voici la bande-annonce.
Si Phil Crifo, Calédonien et co-concepteur du jeu, reste prudent et préfère attendre la sortie du jeu et les réactions du public avant de se réjouir, il se dit "heureux" et "satisfait" de ces premiers retours : "C’est non seulement positif en termes de gameplay, d’un point de vue purement jeu vidéo dans le sens où ils passent un bon moment de jeu, où ils s’amusent, que les mécaniques fonctionnent".
La Calédonie absente des jeux vidéo
"Mais il y a aussi une deuxième couche d’appréciation pour ce qu’on fait d’un point de vue culturel, de l’inspiration qu’on a vis-à-vis de la Nouvelle-Calédonie, de traiter d’un sujet qui est très peu traité dans les médias et encore moins dans les jeux vidéo", assure-t-il.
Comme Nouvelle-Calédonie la 1ère l’a déjà évoqué, Tchia est en effet un jeu conçu par plusieurs Calédoniens dont Phil Crifo et Thierry Bourra, qui se déroule dans un univers très largement inspiré de la Nouvelle-Calédonie, et dont l’héroïne est une jeune fille kanak prénommée Tchia.
Celle-ci doit retrouver et libérer son père qui a été enlevé par d'étranges créatures en tissu appelées les Maano (visibles ci-dessous) sur les ordres d’un tyran administrateur de l’archipel.
Cette quête est parsemée d'éléments culturels, comme le ukulele, et de rencontres avec des personnages qui vont lui parler en français et en drehu, une des langues kanak.
Amener "de la fraîcheur"
Autant dire que Tchia apparaissait au départ comme un ovni, sachant que la quasi-totalité des jeux vidéo sont doublés ou sous-titrés en anglais, et que les univers des super-productions sont extrêmement formatés, avec un décor hyperréaliste ou heroic fantasy.
Mais pour Phil Crifo, le pari n’était pas si risqué : "Je pense qu’il y a une grosse majorité des gens et la presse comprise qui commencent à être un peu fatigués des blockbusters et des choses codifiées, donc dès qu’on arrive avec un peu de fraîcheur, c'est souvent très positif."
"Là où ça peut être considéré comme un risque, c’est plus d’un point de vue commercial, pour vendre un jeu inspiré d’une culture dont personne n’a jamais entendu parler, poursuit-il. Mais à notre échelle [le studio Awaceb créé par Phil Crifo et son associé emploie neuf personnes, NDLR], ce serait bête d’aller s’enfermer dans des carcans."
"Un petit peu d'inconscience"
Quant à la langue, le créateur calédonien reconnaît en riant qu’"il y a peut-être un petit peu d’inconscience quand on y pense avec le recul". Mais là encore, la prise de risque était "mesurée". "Le postulat de base, c'était de faire un jeu inspiré par la Nouvelle-Calédonie, explique-t-il. Avec ce postulat-là, dans quel monde on aurait fait un jeu doublé en anglais ? Cela n’aurait eu aucun sens !"
Il voulait même utiliser plus de langues kanak dans le projet : "Mais je pense que c’est déjà vraiment chouette d’avoir intégré le drehu, il est vraiment au cœur du jeu dans tous les aspects."
Et les retours de la presse internationale sont d’après lui plutôt positifs : ils ne "sont pas déboussolés car quand on n’est pas un joueur anglophone, on a quand même l’habitude de lire des sous-titres, il y a beaucoup de jeux qui ne sont doublés qu’en anglais et sous-titrés. […] Là où ça va interpeller plus, ce sont les joueurs anglophones qui ont l’habitude d’avoir des jeux dans leur langue, mais la presse anglophone jusqu’à maintenant a été super positive."
"Au final, c’est ce qui fait en grande partie le sel du jeu et l’intérêt du projet, se défend-il. Effectivement cela rajoute une couche et une difficulté pour aller convaincre, mais je pense que c’est aussi une curiosité qui peut intriguer."
"C'est assez fou !"
De fait, le Calédonien et ses collègues ont en effet réussi à séduire des investisseurs basés notamment à Londres et Singapour, et surtout le géant Sony qui va proposer Tchia sur sa console Playstation. "Sortir un jeu en exclusivité avec Sony, c’est quand même assez fou, surtout un petit studio comme nous", souffle Phil.
Ce sont d’ailleurs ces partenariats-là qui ont modifié le calendrier de sortie du jeu, initialement programmée au printemps 2022.
"On a pris ce confort-là et cette confiance qu’ils avaient mise dans le studio et dans le projet pour prendre le temps de faire le jeu qu’on avait vraiment envie de faire", explique-t-il avant de citer Shigeru Miyamoto, le créateur de Mario et Zelda. "Un jeu qui est repoussé sera éventuellement bon et un jeu qui est sorti mauvais pour toujours sera mauvais. Donc on a un peu pris ça à cœur et on s’est dit on va faire le meilleur jeu possible et on a pris un peu de temps pour le faire."
Un retour en enfance
Un jeu qui touchera les jeunes mais aussi les adultes, c’est ce qu’espère Phil Crifo. "On a décidé de créer un univers qui rappelle l’innocence qu’on avait quand on était gamins", raconte-t-il. Un univers dans lequel "un public plus jeune va pouvoir s’amuser", mais qu’"un public plus âgé va pouvoir apprécier comme un retour en enfance", estime-t-il.
S’il n’y a pas encore de date précise officielle pour l’instant, la sortie de Tchia est prévue au printemps 2023.