Lorsque François-Noël Buffet est arrivé à la tête du ministère des Outre-mer, fin septembre, il a trouvé sur son bureau une copie qui ne lui a pas nécessairement plu au vu du travail qui l'attend : celle de son budget de l'année prochaine. Alors que l'examen du projet de loi de finances (PLF) 2025 a commencé au Parlement, le ministre, parti pour son premier déplacement ministériel en Nouvelle-Calédonie, compte bien "améliorer la copie" du budget, a indiqué son équipe mardi 15 octobre.
Dès sa prise de fonction, il a entendu la colère et les craintes émises par les représentants politiques ultramarins qu'il a reçus à son ministère. "Il est relativement inquiet au regard des coupes sombres que l'on souhaite faire dans le budget des Outre-mer", confiait alors la présidente du conseil régional de La Réunion, Huguette Bello, après son entretien avec le nouveau locataire de la rue Oudinot, le 27 septembre.
Car la baisse du budget accordé au ministère des Outre-mer n'était pas une surprise. Pendant que le Premier ministre Michel Barnier travaillait sur la composition de son gouvernement dans un contexte politique et économique tendu, il planchait au même moment sur l'écriture du budget 2025, alors que les échéances approchaient à grands pas. Résultat : avant même la nomination de ses ministres, le Savoyard prévoyait une baisse significative des crédits de plusieurs ministères, dont celui des Outre-mer.
Des discussions au Parlement
Le coup de rabot budgétaire a été confirmé jeudi 10 octobre lors de la présentation officielle du projet de loi de finances : les crédits alloués à la mission Outre-mer passeront de 2,8 milliards € en 2024 à 2,55 milliards € en 2025, soit une baisse de 250 millions d'euros.
Difficile de savoir exactement quels postes de dépenses seront les plus concernés : la continuité territoriale ? L'aide aux collectivités ? Le fonds exceptionnel d'investissement ? En tout cas, le ministère des Outre-mer précise ne pas vouloir toucher aux crédits dédiés à la politique du logement en Outre-mer, ni à ceux consacrés au Régiment du Service Militaire Adapté (RSMA). C'est surtout la ligne de dépense intitulée "Conditions de vie Outre-mer" qui diminue le plus. Ces crédits, qui financent entre autres la continuité territoriale, passent de 920 millions € à 610 millions € (une baisse drastique d'environ un tiers entre 2024 et 2025).
"Les économies doivent être faites au bon endroit, et pas sur les Outre-mer qui souffrent déjà !", critiquait le député de la Guadeloupe Olivier Serva (LIOT) au soir de la présentation du budget de l'État. "Nous sommes dans une situation d’urgence", rappelait quant à elle l'élue martiniquaise Béatrice Bellay (PS). Même au sein des parlementaires soutenant la majorité, les critiques se font vives. Dans une tribune publiée dans Libération lundi, les sénateurs et sénatrices d'Outre-mer du groupe RDPI (groupe macroniste au Sénat) estiment que "le projet de loi de finances (...) traduit une très mauvaise lecture des situations de crise que traversent nos territoires et vient en parfaite contradiction avec l’ampleur de la réaction de l’État attendue par nos populations".
Avec une majorité d'élus ultramarins opposés aux baisses annoncées du budget du ministère des Outre-mer, François-Noël Buffet n'aura d'autres choix que d'essayer de limiter la casse. "Je fais tout pour", promettait-il à Outre-mer la 1ère juste avant la présentation du PLF 2025. Ce budget "doit faire l'objet de discussions", disent les équipes du ministère.
Les débats parlementaires sur le budget Outre-mer se fera les prochaines semaines à l'Assemblée nationale et au Sénat, où les parlementaires, à force d'amendements, tenteront tant bien que mal de gratter quelques crédits supplémentaires. Mais le Premier ministre pourrait bien utiliser le 49-3 pour forcer l'adoption de son budget. Ce sera donc à lui de décider quels amendements il garde ou non. Le ministère des Outre-mer sera également attentif aux budgets des autres ministères qui, de près ou de loin, auront un impact dans les territoires ultramarins. La bataille législative ne fait que commencer.