Le scandale a près de dix ans, et pourtant, les airbags défectueux de l'équipementier Takata font encore des morts et des blessés. En mai dernier, une Guadeloupéenne est morte au volant de son véhicule. Si l'hypothèse d'une mort par balle a été dans un premier temps envisagée, c'est désormais celle d'un airbag défectueux qui est privilégiée. Deux jours après, un jeune homme meurt au volant de sa Citroën C3. L'autopsie met en cause l'airbag de la voiture, qui, en explosant, a projeté un éclat de métal au visage du conducteur. Toujours en Guadeloupe, toujours le mois dernier, un père de famille a miraculeusement survécu alors qu'une pièce métallique s'est fichée dans son cou. Les airbags de sa C3 venaient de se déclencher. En septembre 2021, c'est une Réunionnaise qui décède au volant de sa Citroën DS3. Là aussi, ses proches soupçonnent les airbags. Face à la multiplication des drames, des familles de victimes guadeloupéennes et des blessés ont décidé de porter l'affaire devant la Justice.
En 2014, les autorités américaines révèlent que certains airbags produits par le japonais Takata ne présentent pas toutes les garanties de sécurité. Pire, l'équipementier aurait sciemment caché les défauts de ses produits à ses clients. Plus de 100 millions de véhicules de différentes marques (Toyota, Citroën, mais aussi Ford ou Volkswagen) sont concernés dans le monde. Après le scandale et le rappel de plusieurs millions de véhicules au niveau mondial, l'équipementier japonais Takata a versé une amende d'un milliard de dollars aux États-Unis, avant de déposer le bilan.
Pourtant, des véhicules à risque, notamment des Citroën et des DS, continuent de rouler. En avril, la députée de La Réunion, Karine Le Bon, a interpellé le gouvernement sur la question. Elle déplore la circulation "encore trop importante" de véhicules "équipés de ces dispositifs présentant un danger pour les usagers de la route", en particulier pour "les populations ultramarines".
Air chaud et humide
En effet, les climats chauds et humides des Outre-mer augmentent considérablement les risques. Les airbags Takata contiennent du nitrate d'ammonium, qui sert à gonfler le coussin. Ce gaz devient explosif sous l'effet combiné de la chaleur et de l'humidité, expliquent les experts que nous avons interrogés. En explosant violemment après un choc minime, voire sans raison apparente, les airbags sont doublement dangereux : non seulement ils font perdre le contrôle du véhicule au conducteur, mais le choc est tel qu'il propulse des pièces métalliques dans l'habitacle. Des projectiles lancés à pleine vitesse qui peuvent gravement blesser ou tuer le conducteur ou les passagers.
Malgré les campagnes de rappel -une nouvelle vient d'être lancée en Guadeloupe- il est parfois difficile pour les marques de joindre les conducteurs. Les véhicules, mis sur le marché entre 2010 et 2017, étant relativement anciens, certains ont été revendus, parfois plusieurs fois, et le nouveau propriétaire est introuvable. Il arrive aussi que les campagnes arrivent trop tard. Dans le cas de la Réunionnaise décédée en décembre 2021, ses proches ont reçu, comme d'autres propriétaires, un courrier du constructeur les invitant à contrôler ou à changer les airbags pour des raisons de sécurité. La lettre est arrivée près d'un an après sa mort.
Que faire si on a un doute ? Pendant les campagnes de rappel, des pages dédiées sont mises en ligne par les constructeurs. Pour savoir si votre véhicule est à risque, il faut rentrer le numéro d'identification du véhicule, inscrit sur la carte grise, sur ces sites, ou se rapprocher du concessionnaire ou de l'importateur du véhicule.