Route du Rhum 2022 : la malédiction des skippers ultramarins

"6, 5, 4, 3, 2, 1... Départ !" En lançant la 12ᵉ édition de la Route du Rhum mercredi 9 novembre depuis Saint-Malo, le président du conseil régional de la Guadeloupe Ary Chalus espérait porter bonheur aux dix skippers ultramarins (et en particulier aux Guadeloupéens) engagés dans la course. Et voir, pourquoi pas, au moins l'un d'entre eux gagner en arrivant premier à Pointe-à-Pitre. Mais, très vite, une malédiction s'est abattue sur les navigateurs d'Outre-mer : depuis le début de la traversée, six d'entre eux ont eu des problèmes de santé ou des avaries les forçant à se dérouter. Voire à abandonner.

• L'otite de Sacha Daunar

Tout commence le 9 novembre. Avec trois jours de retard, le départ de la Route du Rhum est donné. Les skippers s'élancent depuis le large de la Bretagne, direction les Antilles. Mais l'un d'entre eux doit immédiatement faire demi-tour, car un mal d'oreille le dérange : le Martiniquais vivant en Guadeloupe, Sacha Daunar (Cit'Hôtel – Région Guadeloupe), est contraint de retourner à Saint-Malo pour se faire soigner. 

Dans une vidéo postée sur Facebook samedi, le navigateur, lancé dans sa toute première Route du Rhum dans la catégorie Class40, indiquait que son état de santé ne lui permettait pas de repartir dans l'immédiat. L'homme espère pourtant s'élancer dans la course le plus vite possible.

Mais son départ, s'il devait avoir lieu, dépendra des caprices de la météo : plusieurs fronts froids dans le golfe de Gascogne l'empêcheront de partir "avant jeudi ou vendredi prochain".

• David Ducosson en panne de pilote

Après 24 heures de course, le Guadeloupéen David Ducosson (Trilogik - Dys de Cœur), qui concourt dans la catégorie Rhum Multi, est tombé en pane de pilote. Non loin des côtes, il a alors rejoint Brest dans la soirée pour y faire une escale technique.

Son voilier mouille désormais à Lorient, où il est en cours de réparation. Son équipe "étudie la prochaine fenêtre météo" pour déterminer à quel moment il pourra repartir.

• Damien Seguin percuté par un cargo

Un des autres représentants de la Guadeloupe lors de cette 12ᵉ édition de la Route du Rhum, Damien Seguin, a lui été victime d'un accident dans la nuit du jeudi 10 au vendredi 11 novembre. À 3 h 30, à 250 milles dans l’ouest des Sables d’Olonne, un cargo a percuté l'Imoca du Guadeloupéen (Groupe APICIL). Sain et sauf, le skipper a tenté de raccommoder son monocoque endommagé pour pouvoir reprendre la course alors qu'il pointait à la 14ᵉ place. En vain. 

Le champion paralympique a été contraint de jeter l'éponge vendredi. Après avoir démâté, il est retourné en Bretagne. "La casse fait partie du jeu, mais c’est toujours un peu dur à encaisser", s'est-il lamenté après avoir débarqué à Lorient dimanche. 

• Kéni Piperol victime d'une voie d'eau

Bien lancé dans la course, le skipper guadeloupéen Kéni Piperol (Cap’tain Alternance) avait réussi à prendre la tête de la Class40 au bout de 24 heures. Mais samedi 12 novembre, à 11 h heure de Paris, il a contacté la direction de La Route du Rhum pour avertir les organisateurs que son bateau subissait une voie d'eau.

Le jeune homme de 26 ans participe à sa première Route du Rhum, où il concourt avec un bateau à 98% recyclable. Dimanche, la carte permettant de suivre en direct les participants montraient que le voilier de Kéni Piperol était arrivé au port de La Corogne, en Espagne.

• Thibaut Vauchel-Camus a chaviré

Le même jour, en fin de journée, c'est un autre Guadeloupéen qui s'est retrouvé en difficulté : Thibaut Vauchel-Camus a chaviré entre le Portugal et les Açores. Après avoir passé la nuit dans la coque centrale de son trimaran Solidaires en peloton-Arsep, le skipper a été secouru dimanche matin.

Alors qu'il était en tête du classement provisoire des Ocean Fifty, le navigateur a été forcé d'abandonner la course. Il venait de traverser un front froid court, mais violent, qui a secoué la quasi-totalité de la flotte et provoqué trois démâtages ainsi que de nombreuses avaries plus ou moins sérieuses.

Selon Claude Thélier, consultant voile de Guadeloupe La 1ère, "le début de la Route du Rhum est toujours compliquée", comme le témoignent les nombreuses avaries et abandons de skippers, Ultramarins et non-Ultramarins y compris. Les conditions météorologiques et la fatigue ont une grande part de responsabilité.

Cette année, on a beaucoup de fronts qui traversent la flotte. Ils ne sont pas très violents, mais avec des vents qui changent de direction, il faut réussir à [les] anticiper.

Claude Thélier, consultant voile

• Daniel Écalard tombe en panne

Le seul skipper aux couleurs de la Martinique, Daniel Écalard (SOS Pare-Brise +), est le dernier navigateur ultramarin à avoir connu une avarie, dimanche 13 novembre. Les deux pilotes automatiques de son monocoque sont tombés en panne. Son équipe assure qu'il va bien et qu'il se dirige désormais vers Vigo, en Espagne, pour réparer son navire.

Dans une vidéo envoyée à son équipe dimanche matin, le navigateur indiquait avoir passé une "nuit agitée". Il a dû bricoler un montage de fortune pour que ses pilotes lui permettent de naviguer jusqu'en Espagne. "En réalité, ils fonctionnent, mais ils ne gardent pas le cap", précisait-il. 

Concourant dans la catégorie des Rhum Mono, Daniel Écalard, installé en Martinique depuis de nombreuses années, avait déjà participé à la Route du Rhum en 2014 avec ce même navire.