CHRONOLOGIE. Retour sur quatre mois de crise en Nouvelle-Calédonie déclenchée par le projet de réforme électorale

Au verrou Nord, juste avant la tribu de Saint-Louis, au Mont-Dore.
Dans son discours de politique générale, Michel Barnier vient d'annoncer l'abandon du projet de réforme électorale en Nouvelle-Calédonie, projet qui avait déclenché la crise sur le Caillou en mai dernier. Chronologie de quatre mois de troubles qui ont fait 13 victimes.

Le dégel du corps électoral en Nouvelle-Calédonie est abandonné. C'est en creux ce que vient d'annoncer Michel Barnier ce 1er octobre devant l'Assemblée nationale, dans son discours de politique générale.

Michel Barnier a annoncé mardi que les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie seront reportées "jusque fin 2025" et que le projet de loi constitutionnelle de dégel du corps électoral, à l'origine des émeutes qui ont enflammé l'archipel, ne "sera pas soumis au Congrès".

Les indépendantistes rejettent le projet de loi constitutionnelle, suspendu en juin. Ce projet vise à élargir le corps électoral pour les scrutins provinciaux aux résidents installés depuis au moins dix ans dans cet archipel français du Pacifique Sud (270.000 habitants).

Les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie seront reportées "jusque fin 2025" et le projet de loi constitutionnelle de dégel du corps électoral ne "sera pas soumis au Congrès". Ce projet, qui visait à élargir le corps électoral pour les scrutins provinciaux aux résidents installés depuis au moins dix ans dans cet archipel français du Pacifique sud (270.000 habitants), a été rejeté par les indépendantistes au point d'engendrer des émeutes meurtrières. Retour sur quatre mois de crise.

13 et 14 mai : émeutes et couvre-feu

Dans la nuit du 13 au 14 mai, alors que le texte est débattu à l'Assemblée nationale, des émeutes éclatent. Des véhicules sont incendiés, des commerces pillés et des barrages routiers érigés, principalement autour de Nouméa. Des jeunes masqués affrontent les forces de l'ordre lors de violences inédites sur ce territoire depuis près de quarante ans.

Le 14, le couvre-feu est décrété à Nouméa. L'aéroport international et des écoles sont fermés.

Le mur d'escalade de Magenta a brûlé, le 14 mai 2024 à Nouméa.

Du 14 au 16 mai : premiers morts et état d'urgence

Dans la nuit du 14 au 15 mai, adoption houleuse à l'Assemblée de la réforme.

Le 15, Emmanuel Macron impose l'état d'urgence dans le territoire. Les émeutes font quatre morts en deux nuits : un gendarme de 22 ans et trois Kanak, dont un étudiant de 19 ans et une jeune fille de 17 ans.

Un autre gendarme sera tué accidentellement par un collègue le 16 mai. L'armée se déploie et, mesure inédite, le réseau social TikTok est interdit.

16 mai : l'Azerbaïdjan accusé d'ingérence

Le 16, Gérald Darmanin accuse l'Azerbaïdjan d'ingérence en faveur des émeutiers. Bakou conteste. Plus de 80 % du circuit de distribution (magasins, entrepôts, grossistes) de Nouméa est "anéanti".

Le 18, le passage prévu en juin de la flamme olympique est annulé. Un homme est tué dans un échange de coups de feu sur un barrage, sixième décès.

L'élue Omayra Naisseline (à droite) aux côtés de Sahiba Gafarova la présidente de l'assemblée nationale d'Azerbaïdjan. Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie est représenté par un drapeau du FLNKS.

23 mai : visite d'Emmanuel Macron

Le 19, l'État dégage les barrages routiers entre Nouméa et l'aéroport. Certains sont vite rétablis. Les présidents de quatre exécutifs d'Outre-mer appellent au "retrait immédiat" de la réforme pour empêcher une "guerre civile". Les pays voisins s'activent pour évacuer leurs ressortissants.

Arrivé le 23 à Nouméa, Emmanuel Macron s'engage à ne pas passer "en force" et souhaite un "accord global" suivi d'un vote des Calédoniens sur le statut institutionnel de l'île.

Un homme est tué le 24 par un policier, après la visite du président.

Le 28, l'état d'urgence et l'interdiction de TikTok sont levés.

Emmanuel Macron haranguant les Calédoniens le 26 juillet 2023, à Nouméa.

12 juin : suspension de la réforme

Deux hommes, blessés par des gendarmes fin mai et début juin, succombent à leurs blessures

Le 12 juin, Emmanuel Macron suspend la réforme électorale. L'aéroport et les établissements scolaires rouvrent.

19 juin : coup de filet chez les indépendantistes

Le 19 juin, Christian Tein, leader de la CCAT (Cellule de coordination des actions de terrain), groupe indépendantiste accusé par le gouvernement d'avoir orchestré les émeutes, est arrêté avec d'autres militants.

Au total, 13 membres de la CCAT sont mis en examen notamment pour complicité de tentative de meurtre et association de malfaiteurs, dont sept sont initialement placés en détention provisoire en métropole.

Incarcéré à Mulhouse (Haut-Rhin), Christian Tein affirme être "un prisonnier politique". Il sera désigné le 31 août président de l'alliance indépendantiste du Front de Libération nationale kanak et socialiste (FLNKS).

Le 24 juin, les violences reprennent.

Les dégâts, colossaux depuis le début de la crise, sont évalués à au moins 2,2 milliards d'euros.

7 juillet : un député indépendantiste élu

Le 7 juillet, la Nouvelle-Calédonie envoie, pour la première fois depuis 1986, un député indépendantiste à l'Assemblée nationale, Emmanuel Tjibaou.

Le 10, un homme recherché par les gendarmes est tué dans un échange de tirs. C'est le dixième mort.

29 août : les indépendantistes perdent la présidence du Congrès

Le 15 août, après trois mois de crise, une 11ᵉ personne décède, un homme tué par un tir de gendarme.

Le 29, les indépendantistes perdent la présidence du Congrès, assemblée qui élit notamment le gouvernement de l'île.

Le 6 septembre, prolongation du couvre-feu et de l'interdiction des rassemblements.

Du 18 au 19 septembre : 12ᵉ et 13ᵉ morts

Le 12 septembre, la justice refuse de dépayser l'enquête judiciaire visant des militants indépendantistes. 

Dans la nuit du 18 au 19, deux Kanak de la tribu de Saint-Louis sont tués par des gendarmes lors d'une opération. Ils appartenaient à un groupe soupçonné d'une cinquantaine de car-jacking et de tirs sur les forces de l'ordre.

1er octobre : abandon du dégel électoral

Le 1ᵉʳ octobre, dans sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale, Michel Barnier annonce le report à "fin 2025" des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie.

Quant au dégel du corps électoral, le Premier ministre assure qu'il ne "sera pas soumis au Congrès" du Parlement. Il se dit également désireux de s'impliquer "personnellement" dans ce dossier.